Dès la fin du XIè siècle et au début du suivant, les efforts des premiers Capétiens pour organiser leur royaume, encore peu étendu mais qui s'agrandira rapidement, et y ramener la prospérité, commencent à porter leurs fruits. L'union intime de la royauté capétienne et du clergé régénéré permet au magnifique mouvement religieux réformé de se manifester dans la construction de grandes et belles églises, non seulement dans les villes, mais aussi dans les campagnes.
L’âge roman « classique » se caractérise essentiellement par ses voûtes appareillées et par le choix de solutions internes à l'édifice pour absorber et dévier les poussées engendrées par ces voûtes. Elle se distingue selon des variétés régionales (Demi berceaux sur tribunes en Auvergne et Bourgogne, berceaux brisés en Provence, absence de voûtement en Normandie…) mais aussi en fonction des routes de pèlerinages (Saint Sernin et Saint-Jacques de Compostelle sont construites sur le même modèle) et parfois en fonction des ordres auxquels elles sont affiliées (Cluny, Cîteaux…)
Au cœur de la Rhénanie et de l'Allemagne ottonienne, l'Alsace et la Lorraine connaissent aux XIè et XIIè siècles une période particulièrement florissante, enrichie d'influences lombardes et bourguignonnes.
L’influence ottonienne est plus importante en Alsace (Marmoutier, Rosheim, Sainte-Foy de Sélestat, Murbach, Guebwiller) ou à Verdun dans la cathédrale consacrée dans le premier tiers du XIIè siècle (1147), transformée à l'époque gothique (deux transepts et deux absides opposées enchâssées entre deux tours).
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Mont Devant Sassey (Meuse) : église Notre Dame de l’Assomption. La crypte |
L’influence bourguignonne, certes présente en Alsace (Sainte Foy de Sélestat, cathédrale de Bâle, prieuré de Feldbach, d’influence clunisienne) est beaucoup plus sensible en Lorraine, comme à la cathédrale de Verdun (porte est du croisillon nord), Notre Dame de Saint-Dié, Champ le Duc, Relanges, Senones, Etival.
Le plan basilical reste la plus fréquent avec une nef à collatéraux coupée par un transept et un chœur en hémicycle ; la nef est généralement couverte de charpente et les absides de voûtes en cul-de-four ; quelques bas-côtés reçoivent des voûtes d'arêtes (Sainte-Marie au Bois en Meurthe-et-Moselle) ainsi que certaines nefs (Rosheim, Notre ;Dame de Saint-Dié), mais ces églises voûtées sont de petites dimensions (Olley, Aube en Saulnois) ; les cryptes et les tours de quelques clochers sont voûtées d'arêtes. A la fin du XIIè apparaissent les voûtes d'ogives sur plan carré, correspondant à deux travées voûtées d'arêtes des collatéraux (Rosheim).
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Etival-Clairefontaine : l’église abbatiale saint Pierre. La nef |
Les grandes arcades et les doubleaux retombent sur des files de colonnes ou sur des colonnes alternant avec des piliers (alternance des supports). La construction est forte et puissante, les contreforts extérieurs sont souvent réduits à de simples bandes verticales ou à des arcades à peine saillantes (Bandes lombardes).
Un porche profond ou un vaste narthex se dresse souvent en façade, (Marmoutier, Sélestat, Guebwiller). La tribune qui surmonte le narthex entre deux tours ou tourelles d'escalier rappelle les grandes tribunes occidentales carolingiennes destinées à abriter la loge impériale.
Les clochers, nombreux, importants, à plusieurs étages, carrés, parfois octogones ou ronds, se dressent de chaque côté du chœur, en façade et sur le carré du transept.
Le décor sculpté reste rare jusque vers 1130. Elle est en méplat (Marmoutier, chapiteaux du cloître d’Eschau) puis s’arrondit et se détache du fond à partir de 1150, mais reste cependant assez lourde quoique débordante de vie comme à Andlau, Murbach, Sélestat ou Lautenbach.