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L’art roman en France

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2. Le second âge roman

Les nouveautés
Ile de France, Vermandois, Champagne
Alsace Lorraine
Normandie
Pays de Loire, Maine
Bretagne
Aquitaine
Limousin
Auvergne
Velay et Forez
Languedoc et Midi pyrénéen
Roussillon
Eglises des routes de pèlerinage
Bourgogne et pays adjacents
Alpes, Corse et Provence

Dès la fin du XIè siècle et au début du suivant, les efforts des premiers Capétiens pour organiser leur royaume, encore peu étendu mais qui s'agrandira rapidement, et y ramener la prospérité, commencent à porter leurs fruits. L'union intime de la royauté capétienne et du clergé régénéré permet au magnifique mouvement religieux réformé de se manifester dans la construction de grandes et belles églises, non seulement dans les villes, mais aussi dans les campagnes.

L’âge roman « classique » se caractérise essentiellement par ses voûtes appareillées et par le choix de solutions internes à l'édifice pour absorber et dévier les poussées engendrées par ces voûtes. Elle se distingue selon des variétés régionales (Demi berceaux sur tribunes en Auvergne et Bourgogne, berceaux brisés en Provence, absence de voûtement en Normandie…) mais aussi en fonction des routes de pèlerinages (Saint Sernin et Saint-Jacques de Compostelle sont construites sur le même modèle) et parfois en fonction des ordres auxquels elles sont affiliées (Cluny, Cîteaux…)

2.1. Les nouveautés

2.1.1. Les matériaux

Ces solutions aux problèmes de construction dépendent, pour bonne part, de la qualité des matériaux employés. Les voies romaines n'étant pas entretenues, de nouveaux chemins naissent pour répondre aux besoins de la féodalité et des grands ordres monastiques, de Cluny notamment qui est en rapports constants avec tout l'Occident.

Toulouse (Haute Garonne) : basilique saint Sernin. Tour de croisée et transept sud
Toulouse (Haute Garonne) : basilique saint Sernin. Tour de croisée et transept sud

La facilité des transports par eau explique des parentés et des rapprochements entre des monuments construits sur les rives d'un même fleuve ou près des ports maritimes. Ailleurs, les architectes utilisent le plus possible la pierre, la chaux et le sable des carrières proches, le bois des forêts voisines : roches volcaniques et granits du Centre et de Bretagne, arkose d'Auvergne, craie de Champagne, calcaires tendres de l'Ouest, calcaires durs de Bourgogne et du Nivernais, de Caen, de Vernon, de Saint-Leu, grès des Vosges, briques du Languedoc, marbre des Pyrénées. Ces matériaux, très différents comme grain, comme résistance, comme couleur même, sont taillés à la laye en bel appareil, et l'on sait quelle admiration avaient les chroniqueurs du XIè siècle pour les monuments construits en pierre de taille « ex quadris lapidibus » : Saint Remi de Reims, Saint Benoît sur Loire, la crypte de la cathédrale d'Apt. Ce bel appareil, très régulier, donne l'échelle de l'édifice. Souvent, ces pierres portent la signature de celui qui les a taillées, aussi pouvait-on surveiller le travail et payer l'ouvrier à la tâche. Parfois aussi, des marques de pose indiquaient au maçon la mise en place prévue par l'architecte.

Saint Benoît sur Loire (Loiret) : abbaye saint Fleury. Le chevet
Saint Benoît sur Loire (Loiret) : abbaye saint Fleury. Le chevet

2.1.2. Plans

Le plan est tracé sur le sol au moyen de cordeaux, après le nivellement de l'emplacement. Puis, sur le plan, on dessine l'élévation, en utilisant sans doute des formules géométriques et des relevés conservés secrètement dans les ateliers. Les fondations, presque toujours enfoncées profondément dans le sol, nécessitent un cubage de matériaux considérable, et l'on y emploie, avec de gros blocs de libage, les pierres provenant de monuments antérieurs. Lorsqu'il s'agit d'une église, on remploie en effet les matériaux anciens qui, selon Pierre le Chantre, le célèbre théologien de la fin du XIIè siècle, ayant été consacrés par la dédicace au service de Dieu, ne peuvent être convertis à des usages vulgaires.

2.1.2.1. Plan basilical

Les plans, bien que très variés, présentent cependant pour toute la France, une certaine unité due aux nécessités du culte et de la liturgie. Tout au plus peut-on reconnaître, çà et là, des groupes d'églises témoignant de caractères communs nettement accusés.

Les églises à nef unique, très nombreuses dans l'Ouest, le Midi et le sud-est de la France, sont d'importance modeste, surtout lorsque les voûtes en berceau, difficiles à contrebuter, ont été employées. Les églises couvertes de files de coupoles font exception. Les grandes églises ont un narthex entre deux tours, une nef à collatéraux, rarement doubles, un transept et un chœur en hémicycle ; dans les régions où s'impose l'influence ottonienne, on voit parfois une seconde abside à l'ouest aux cathédrales de Verdun, de Besançon et de Nevers par exemple et un transept occidental (cathédrale de Liège, église Sainte Gertrude de Nivelles). Il y a aussi, le plus souvent en Auvergne et dans les provinces avoisinantes, une vaste tribune aménagée au dessus du narthex ou du porche occidental et ouverte largement sur la nef. Dans les églises importantes, le chœur est développé pour le déploiement des grandes cérémonies, et pour faciliter l'accès des fidèles au tombeau du saint dont les reliques attirent les foules. Ce peut être soit un chœur de plan dit bénédictin, soit un grand sanctuaire à déambulatoire et chapelles rayonnantes. Ainsi passe-t-on du maigre sanctuaire en hémicycle des basiliques chrétiennes primitives - qui restera la règle en Orient - au chœur imposant caractéristique des grandes églises romanes et gothiques.

Saint Nectaire (Puy du Dôme) : vues de l’église du prieuré
Saint Nectaire (Puy du Dôme) : vues de l’église du prieuré

Ce type architectural apparaît à peu près en même temps dans la zone ottonienne et dans la zone française, sous l'influence du développement du culte des reliques.

On avait, dès l'époque mérovingienne et carolingienne, construit à l'est du sanctuaire abritant les corps saints, une rotonde ou un oratoire polygonal, tréflé ou quadrilobé, destiné à rassembler les fidèles près du tombeau sacré, chapelle toute proche des reliques du saint patron, elles mêmes déposées sous l'autel du sanctuaire, au dessus du sol. Tandis qu'en Orient le « martyrium » qui abrite les reliques conserve son autonomie de chapelle plus ou moins détachée de la grande église, en Occident où ce culte connaît un succès beaucoup plus durable, il impose des transformations dans le chœur et la crypte qui conserve les reliques. Au dessus de celle-ci, généralement voûtée, et qui peut être creusée dans le sol ou se trouver au même niveau que la nef, on place l'autel, autour duquel s'ordonne le chœur surélevé et voûté, et qu'entoure un déambulatoire. Cette galerie permet aux pèlerins de circuler sans troubler les offices célébrés au chœur et d'approcher les corps saints, dont on aperçoit par d'étroites ouvertures les tombeaux dans la crypte. Bientôt, dans cette dernière, un déambulatoire enveloppera le tombeau du saint. Crypte et chœur seront donc de plan semblable et aussi vastes l'une que l'autre ; mais à mesure que s'écoule le XIIè siècle, les vastes cryptes disparaîtront quand les corps des saints patrons, au lieu d'être présentés aux fidèles dans un caveau sous l'autel du sanctuaire, seront placés dans les châsses et élevés sur le maître-autel.

Saint Léonard de Noblat (Haute Vienne) : la collégiale. Tour et chevet
Saint Léonard de Noblat (Haute Vienne) : la collégiale. Tour et chevet

2.1.2.2. Autres plans

Si les édifices de plan basilical restent les plus nombreux à l'époque romane, les maîtres d'oeuvre emploient aussi pour leurs églises et chapelles des plans variés suivant les traditions venues de l'Antiquité, de Byzance, d'Asie Mineure et déjà adoptés aux temps mérovingiens et carolingiens.

Le plan tréflé - des absides identiques à celle du chœur terminent les bras du transept - se rencontre assez souvent; c'est une survivance carolingienne demeurée très vivace en Rhénanie et qui s'est maintenue jusqu'à l'époque moderne. Certains ont voulu y voir l'intention d'honorer la Trinité; c'est plus sûrement en son honneur que fut élevée l'église de Planès en Roussillon dont le plan, en forme de triangle équilatéral, comporte une absidiole sur chaque côté.

On trouve employé pour quelques monuments exceptionnels – Sainte Croix de Quimperlé, Lanleff - et pour les chapelles d'hôpitaux et funéraires, un plan rayonnant, que ces constructions soient polygonales (Maison Dieu de Montmorillon, Saint Michel d'Entraygues près d'Angoulême) ou circulaires, comme au cimetière de Chambon, en Auvergne. D'autres chapelles encore, toujours de même plan, s'attachent au flanc des cathédrales, chapelles épiscopales sur une crypte abritant la sépulture des évêques, comme à Senlis, ou surmontées d'un étage où était enfermé le trésor.

Lanleff : le sanctuaire dit « le temple ». XIè siècle
Lanleff : le sanctuaire dit « le temple ». XIè siècle

Il ne faut pas confondre ces monuments funéraires avec les chapelles élevées en l'honneur du Saint Sépulcre généralement circulaires à l'image de la rotonde de Jérusalem, et bâties contre le sanctuaire dont elles forment une annexe : c'est le cas à Neuvy-Saint Sépulcre et à Saint Léonard. Parfois un reliquaire monumental, de pierre, s'inspire du Saint Sépulcre lui-même. Ainsi en est-il en Angoumois à La Boulonnie et à Aubeterre dans la curieuse église monolithe Saint Jean, sans doute creusée au XIIè siècle dans la falaise calcaire. Ce type d'église souterraine, tout à fait exceptionnel en France, se retrouve à Saint Emilion, à Saint Georges de Gurat, dans quelques petites chapelles tourangelles et en Auvergne, aux grottes de Jonas.

Neuvy-Saint-Sépulcre (Indre) : la basilique. La nef
Neuvy-Saint-Sépulcre (Indre) : la basilique. La nef

2.1.3. Voûtes et charpentes

L'esprit nouveau se traduit encore par les efforts des architectes pour articuler la construction : murs en pierre de taille chaque fois que les matériaux locaux le permettent ; travées bien marquées ; carré du transept et croisillons nettement différenciés de la nef et du chœur. Les voûtes apparaissent dans le Midi et le sud-est de la France, puis en Bourgogne et dans l'Ouest au XIe siècle et surtout au début du XIIè siècle. Elles sont en berceau sur la nef et le chœur, en cul-de-four sur les absides et les absidioles, d'arêtes sur la crypte, le narthex et les collatéraux, sauf en Provence, où l'on emploie, pour ceux-ci, les voûtes en quart de cercle ; une coupole couvre le carré du transept. Un groupe bien déterminé, dans le sud-ouest, utilise pour la nef, le transept et le chœur des files de coupoles, sur pendentifs le plus souvent. Dans certaines régions, en Normandie, dans le Nord et l'Est, où des voûtes d'arêtes étaient employées parfois au chœur, on attendra, pour couvrir le vaisseau central, que l'usage de la voûte sur croisée d'ogives, montées en saillie sous les arêtes qu'elles renforcent et dont elles facilitent la construction, permette de lancer des voûtes à une grande hauteur sur des surfaces larges et bien éclairées.

Ailleurs, en Poitou par exemple, suivant le témoignage d'un chroniqueur écrivant vers 1130, c'est seulement au XIIe siècle que l'on prend l'habitude de monter des voûtes de pierre à la place des couvertures de bois afin de protéger les édifices contre les dangers d'incendie.

Suivant la qualité des matériaux employés, les voûtes sont construites en blocage ou en claveaux taillés. De place en place, des arcs doubleaux, divisent en tranches la voûte longue et difficile à équilibrer qu'elle soit en berceau ou d'arêtes. Il n'y a pas de doubleaux, ou tout au plus un ou deux, sur toute la longueur de la nef en Auvergne et seulement, d'ailleurs, sur des églises de petites dimensions.

2.1.4. Elévation

L'élévation varie suivant qu'il s'agit d'églises voûtées ou non. Dans les premières, les murs sont épais, et épaulés par de puissants contreforts pour résister aux poussées des voûtes en berceau et des voûtes d'arêtes, ou pour porter le poids très lourd des coupoles. Les piliers des grandes arcades sont cruciformes, souvent à plusieurs ressauts et renforcés de colonnes qui reçoivent à la fois les retombées des doubleaux de la nef et des collatéraux et les grandes arcades. Au-dessus, le mur nu ou décoré d'une arcature, puis les sommiers de la voûte. Dans certains édifices, en Auvergne, surtout, et dans les grandes églises de pèlerinage, des tribunes sont montées sur les collatéraux et les voûtes de celles-ci, généralement en quart de cercle, reçoivent les poussées de la voûte principale. Parfois on contrebute cette dernière en couvrant les collatéraux de berceaux transversaux - par rapport à l'axe de la nef et contigus les uns aux autres -, type de construction logique et solide qu'adopteront rapidement les Cisterciens et qu'ils transporteront en Suisse, en Angleterre, en Allemagne et jusqu'en Suède.

Architecture romane : élévation de trois travées à trois étages : grandes arcades, tribunes, fenêtres hautes
Architecture romane : élévation de trois travées à trois étages : grandes arcades, tribunes, fenêtres hautes

Dans toutes ces églises, l'éclairage intérieur, très médiocre, est assuré seulement par les fenêtres du chœur et les fenêtres basses des collatéraux ; la nef reste obscure. Dans de rares édifices : Cluny et quelques églises de son type, des fenêtres ont été percées entre les sommiers des voûtes hautes et l'arcature ornant le mur contre lequel s'appuie la couverture du collatéral.

Architecture romane : élévation romane à trois étages : grandes arcades, tribunes, fenêtres hautes
Architecture romane : élévation romane à trois étages : grandes arcades, tribunes, fenêtres hautes

Les églises couvertes de charpente apparente, avec ou sans tribune au dessus des collatéraux, bénéficient d'une abondante lumière car les murs, relativement minces, sont percés de grandes fenêtres ; une étroite galerie court parfois à l'appui des fenêtres hautes. Dans ces églises, singulièrement en Normandie, l'armature des piliers portant les grandes arcades se prolonge jusqu'au bout des murs pilier cruciforme, colonnes regardant vers la nef, contrefort extérieur - et constitue un noyau résistant qui raidit le mur gouttereau.

2.1.5. Clochers

Les clochers sont nombreux et puissants, clocher porche au dessus de l'entrée de l'église, clochers flanquant la façade, clochers dressés dans l'angle du chœur et du transept, clocher monté à la croisée du transept sur une coupole sur trompes, plus rarement sur pendentifs. Ce dernier, en général octogone, tandis qu'on bâtit les autres sur plan carré. Certains présentent des caractères particuliers.

Saint Martin de Boscherville : l’abbatiale Saint Georges. Façade
Saint Martin de Boscherville : l’abbatiale Saint Georges. Façade

2.1.6. Caractères régionaux

Sans vouloir conserver au terme d'école tout ce que ce terme comporte de rigide et de dogmatique, sans oublier les efforts faits pour les caractériser et en tracer les limites, il s’agit d’être très prudent en matière de classement et de catégorisation. On ne peut cependant nier l'existence de ressemblances entre églises de telle ou telle province.

Certains monuments ont exercé autour d'eux une influence profonde et très visible. Des groupes se forment, présentent des caractères communs dans le plan, l'élévation, le système de voûtement, les solutions employées pour équilibrer les masses, dans la décoration enfin.

Ces groupes d'églises peuvent être assez différents les uns des autres suivant les régions : survivance des traditions artistiques de l'Antiquité ou au contraire, prédominance des souvenirs celtes et barbares ; influences hispano-mauresques, mérovingiennes, carolingiennes ; qualité du matériau employé ; nécessité d'éclairer plus ou moins, d'après la latitude (nord ou midi) ; degré de civilisation, richesse du pays ; programme imposé par les clercs, influence locale de tel ou tel ordre religieux puissant ; rayonnement d'une région voisine : Rhénanie, Italie, Espagne ; présence d'un « monument type » particulièrement admiré servant de modèle, ou d'un artiste novateur : telles sont les principales raisons qui président à l'origine de ces groupements.

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