B&S Encyclopédie

Index de l'article Index de l'article
1. La mise en place de la politique exterminationniste
1.1. Introduction
1.2. L’environnement de l’opération Barbarossa
1.3. De la « transplantation » à l’extermination

2. Histoire des Einsatzgruppen
2.1. Origines
2.2. La composition des Einsatzgruppen
2.3. L’Einsatzgruppe A
2.4. L’Einsatzgruppe B
2.5. L’Einsatzgruppe C
2.6. L’Einsatzgruppe D

3. Les méthodes des Einsatzgruppen
3.1. Les fusillades
3.2. Les camions à gaz
3.3. Les camps d’extermination

4. Les rapports

5. Les grands massacres
5.1. Le massacre des Juifs de Lettonie
5.2. Babi Yar
5.3. La forêt de Krepiec
5.4. Le massacre des juifs de Przemysl dans la forêt de Grochowce

6. Les victimes

7. L’« Aktion 1005 »
7.1. Origine et objectifs
7.2. Le travail du kommando
7.3. Les procès du « Sonderkommando 1005 »

8. Témoignages
8.1. Les rapports des EG
8.2. Babi Yar, par un officier allemand
8.3. Himmler : Extraits des discours de Poznan
8.4. Massacres à Minsk
8.5. L’Accord OKW-RSHA du 26 mars 1941
8.6. Un chef des EG témoigne
8.7. Le rapport Graebe
8.8. « Les camions de la mort »
8.9. Note pour l’entretien des camions à gaz

9. Le procès des Einsatzgruppen
9.1. Les procès
9.2. Les verdicts du procès de Nuremberg
9.3. Verdicts des autres procès
9.4. Procès en Allemagne de l’Est
9.5. Autres destins

10. Les bourreaux. Biographies
10.1. Achamer- Pifrader Humbert
10.2. Alvensleben Ludolf-Hermann Emmanuel Georg Kurt Werner von
10.3. Baatz Bernhard
10.4. Bach Zelewski Erich von dem
10.5. Barth Horst
10.6. Bassewitz-Behr Georg-Henning, comte de
10.7. Becker August
10.8. Behrends Hermann Johann Heinrich
10.9. Biberstein Ernst
10.10. Bierkamp Walther
10.11. Blobel Paul
10.12. Bluhm Wilhelm
10.13. Blume Walter
10.14. Bock Wilhelm
10.15. Böhme Klaus
10.16. Bradfisch Otto
10.17. Braune Fritz
10.18. Braune Werner
10.19. Buchardt Friedrich
10.20. Christensen Theodor
10.21. Christmann Kurt
10.22. Ehlers Ernst
10.23. Ehrlinger Erich
10.24. Fegelein Herrmann
10.25. Fendler Lothar
10.26. Filbert Albert
10.27. Findeisen Wilhelm
10.28. Fuchs Wilhelm
10.29. Gottberg Curt von
10.30. Haensch Walter
10.31. Hafner August
10.32. Hans Kurt
10.33. Hausmann Emil
10.34. Herrmann Günther
10.35. Hubig Hermann
10.36. Isselhorst Erich
10.37. Jäger Karl
10.38. Janssen Adolf
10.39. Jeckeln Friedrich
10.40. Jost Heinz
10.41. Klingelhöfer Waldemar
10.42. Kutschera Franz
10.43. Landau Felix
10.44. Lange Herbert
10.45. Lange Rudolf
10.46. Meier August
10.47. Meyszner August Edler von
10.48. Naumann Erich
10.49. Nebe Arthur
10.50. Nosske Gustav Adolf
10.51. Ohlendorf Otto
10.52. Ott Adolf
10.53. Pechau Manfred
10.54. Prützmann Hans-Adolf
10.55. Rapp Albert
10.56. Rasch Emil Otto
10.57. Rauca Helmut
10.58. Rauff Walter
10.59. Roch Heinz
10.60. Sandberger Martin
10.61. Schäfer Oswald Theodor August Wilhelm
10.62. Schimana Walter
10.63. Schöngarth Karl
10.64. Schulz Erwin
10.65. Seetzen Heinrich Otto
10.66. Seibert Willi
10.67. Six Franz
10.68. Stahlecker Franz Walter
10.69. Steimle Eugen
10.70. Strauch Eduard
10.71. Suhr Friedrich
10.72. Weinmann Erwin
10.73. Woyrsch Udo Gustav Wilhelm Egon von
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Nazisme : les Einsatzgruppen (2ième guerre mondiale)

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0. Nazisme : les Einsatzgruppen (2ième guerre mondiale)

La mise en place de la politique exterminationniste
Histoire des Einsatzgruppen
Les méthodes des Einsatzgruppen
Les rapports
Les grands massacres
Les victimes
L’« Aktion 1005 »
Témoignages
Le procès des Einsatzgruppen
Les bourreaux. Biographies

8. Témoignages

8.1. Les rapports des EG

« J'ai lu la plupart des rapports et je les ai passés au Docteur Knoblach, Inspecteur de la Police Criminelle, qui les a compilés en premier. La compilation était publiée quotidiennement sous le titre "Rapports de Situation Opérationnels-URSS". Ces rapports étaient tirés au stencil et je les corrigeais. Après ils étaient polycopiés et distribués. Les originaux des rapports qui étaient envoyés à l'Office Principal de Sécurité du Reich [RHSA] étaient signés pour la plupart par le Commandant de l'Einsatzgruppe ou son adjoint. »

Bialystok : rapport de massacre
Bialystok : rapport de massacre

« En vertu de mes fonctions de chef adjoint et plus tard de chef du sous-département IV A 1, j'estime être un témoin compétent et je peux confirmer que les "Rapports de Situation Opérationnels-URSS" qui furent publiés par le chef de la police de sécurité et le service de sécurité dans le dossier marqué IV A 1 furent compilés à partir des rapports originaux des Einsatzgruppen qui parvenaient à mon sous-département par radio ou par lettre. »

Témoignage de Kurt Lindow, Kurt Lindow, responsable de la réception des rapports à l’état major SS., 21 Juillet 1947. (Procès de Nuremberg, NMT Vol. p. 99-100)

8.2. Babi Yar, par un officier allemand

« C'était comme une migration de masse...Les Juifs chantaient des chants religieux en chemin ». Sur le quai, on leur prenait leur nourriture et leurs biens… »

« Alors les Allemands commençaient à pousser les Juifs pour former de nouvelles files, plus étroites. Ils se déplaçaient très lentement. Après une longue marche, ils arrivaient à un passage formé par des soldats allemands avec des massues et des chiens policiers. Les Juifs étaient fouettés sur leur passage. Les chiens se jetaient sur ceux qui tombaient mais la poussée des colonnes qui se pressaient derrière était irrésistible et les faibles et les blessés étaient piétinés. »

« Meurtris et ensanglantés, paralysés par le caractère incompréhensible de ce qui leur arrivait, les Juifs débouchaient sur une clairière d'herbe. Ils étaient arrivés à Babi Yar, devant eux se trouvait le ravin. Le sol était jonché de vêtements. Des miliciens ukrainiens, surveillés par des Allemands, ordonnaient aux Juifs de se déshabiller. Ceux qui hésitaient, qui résistaient, étaient battus, leurs vêtements arrachés. Il y avait partout des personnes nues, ensanglantées. L'air était empli de cris et de rires convulsifs. »

Cité dans Davidowicz, What is the use of Jewish History, p. 106-107.

8.3. Himmler : Extraits des discours de Poznan

« Je me réfère à présent à l'évacuation des Juifs, à l'extermination du peuple juif. C'est une des choses qu'il est aisé d'exprimer : "Le peuple juif est en train d'être exterminé," déclare chaque membre du Parti ! Effectivement, c'est une partie de nos plans, l'élimination des juifs, l'extermination, nous l'accomplissons... Peuh ! Une bricole ! Et puis ils viennent, 80 millions de braves Allemands, et chacun a son « bon » Juif. »

« Evidemment, les autres, ce sont des porcs, mais celui-là, c'est un Juif de première qualité. Pas un d'eux n'a vu [les cadavres], pas un n'était sur place. La plupart d'entre vous savent ce que c'est que de voir un monceau de cent cadavres, ou de cinq cents, ou de mille. Etre passés par là, et en même temps, sous réserve des exceptions dues à la faiblesse humaine, être restés corrects, voilà ce qui nous a endurcis. C'est là une page de gloire de notre histoire, une page non écrite et qui ne sera jamais écrite. »

(4 octobre 1943)
« Je vous demande avec insistance d'écouter simplement ce que je dis ici en petit comité et de ne jamais en parler. La question suivante nous a été posée : « Que fait-on des femmes et des enfants ? » - Je me suis décidé et j'ai là aussi trouvé une solution évidente. Je ne me sentais en effet pas le droit d'exterminer les hommes - dites, si vous voulez, de les tuer, ou de les faire tuer - et de laisser grandir les enfants qui se vengeraient sur nos enfants et nos descendants. Il a fallu prendre la grave décision de faire disparaître ce peuple de la terre. »
(6 octobre 1943)
Discours du Reichsführer-SS Himmler devant des officiers supérieurs SS à Poznan les 4 et 6 octobre 1943 [Trials of War Criminals Before the Nuernberg Military Tribunals - Washington, U.S Govt. Print. Off.,
1949-1953, Vol. XIII, p. 323 ; et Himmler, Reichsführer-SS, P. Padfield, Henry Holt and Co, NY, 1990, p. 469]

8.4. Massacres à Minsk

Extrait d’un rapport d’un commissaire à Minsk en date du 30 octobre 1941 :

« …Faisant valoir que l'action ne se déroulait pas selon mes instructions et que les coups déjà portés à l'économie avaient fait assez de ravages, j'en exigeai l'arrêt immédiat. Très étonné, le capitaine m'expliqua qu'il avait reçu de son commandant l'ordre de libérer la ville des Juifs sans en excepter un seul, comme cela avait été fait dans d'autres villes. Le nettoyage obéissant à des raisons politiques, jamais jusqu'ici les facteurs économiques n'entraient en ligne de compte. » [...]

« Pour le reste, je me vois obligé à mon regret d'insister sur le fait que, à tout le moins, cette action confinait au sadisme. Durant l'action, la ville elle-même offrait un tableau horrible. Avec une incroyable brutalité surtout de la part des Lituaniens, mais aussi des policiers allemands, les Juifs, et également des Biélorusses, furent poussés hors de leurs logements et emmenés ensemble. Il y eut des fusillades partout dans la ville, et dans plusieurs rues on vit s'entasser les corps des Juifs abattus. »

« Les Biélorusses ont éprouvé les plus grandes difficultés à échapper à la rafle. Outre la manière effroyablement barbare dont les Juifs, y compris de nombreux artisans, furent maltraités sous les yeux des Biélorusses, ces derniers furent également battus avec des matraques et des gourdins. On ne peut plus parler d'une action juive, cela s'apparente bien davantage à une révolution. Moi-même et tous mes fonctionnaires passâmes la journée au milieu de tout cela sans souffler, afin de sauver ce qui pouvait être sauvé. A plusieurs reprises, je dus, revolver au poing, faire sortir des ateliers les hommes de la police allemande et les Lituaniens. Mes gendarmes reçurent la même mission, mais, à cause de la fusillade sauvage, ils furent souvent obligés de fuir les rues pour ne pas être eux-mêmes abattus. »

« Tout ce spectacle était épouvantable. Dans l'après-midi, un grand nombre de voitures à cheval sans cocher se tenaient dans les rues, et je demandai à l'administration municipale de s'en occuper. Il se trouva par la suite que c'étaient des fourgons juifs attribués à l'armée pour le transport des munitions. Les Juifs avaient été simplement enlevés et emmenés, sans que personne prît soin des véhicules. [...] Comme je l'ai mentionné au début, les familles des artisans devaient également être épargnées. Il apparaît aujourd'hui, toutefois, que des gens manquent dans presque chaque famille. »

Cité par Christopher R. Browning,
« Des hommes ordinaires : le 101è bataillon de réserve de la police allemande et la solution finale en Pologne » Gallimard, collection Folio, Paris, 1996.

8.5. L’Accord OKW-RSHA du 26 mars 1941

« Les Sonderkommandos sont autorisés, dans le cadre de leur mission et sous leur propre responsabilité, à prendre des mesures exécutives contre la population civile »

« Die Sonderkommandos sind berechtigt im Rahmen irhres Auftrages in eigene Verantwortung gegenüber der Zivilbevölkerung Exekutivmassnahmen zu treffen. »

Accord du 26 mars 1941 entre Wagner de l’OKW et Heydrich du RSHA définissant les conditions d’opération des Einsatzgruppen.

8.6. Un chef des EG témoigne

« L'unité Einsatz pénétrait dans un village ou dans une ville et donnait l'ordre aux citoyens juifs de marque de rassembler tous les Juifs afin de les "réinstaller." »

« On les invitait à remettre tous leurs objets de valeur et, peu avant leur exécution, on leur ordonnait de retirer leurs vêtements de dessus. On les transportait en camion jusqu'au lieu de l'exécution - en général un fossé antichar. (à chaque voyage on n'emmenait que le nombre de victimes pouvant être exécutées sitôt l'arrivée. Ceci afin de limiter au maximum l'espace de temps séparant le moment où les victimes apprenaient ce qui les attendait et celui de leur exécution). »

« Puis des pelotons d'exécution les fusillaient à genoux ou debout.- selon les règles militaires- on jetait les cadavres dans le fossé. Jamais, je n'ai autorisé le tir individuel, j'ai toujours ordonné que plusieurs hommes tirent en même temps afin d'éviter toute responsabilité personnelle directe. D'autres chefs de groupe obligeaient les victimes à s'allonger à plat ventre sur le sol pour recevoir une balle dans la nuque. Je n'approuvais pas ces méthodes. »
« - Pourquoi ? demanda Amen »
« - Parce que, répondit Ohlendorf, c'était psychologiquement une épreuve terrible à la fois pour les victimes et pour ceux qui les exécutaient. »

A propos des camions à gaz :

« On ne pouvait deviner de l'extérieur le but réel de ces remorques. Elles ressemblaient à des camions fermés et elles étaient construites de telle sorte qu'au démarrage du moteur le gaz (d'échappement) pénétrait dans la remorque provoquait la mort en dix à quinze minutes. »
Otto Ohlendorf (Chef de l'EG D) interrogé à Nuremberg par le colonel J.Harlan Amen TMWC IV, p.311-323 - NCA V, p.431-442

8.7. Le rapport Graebe

« Je soussigné Hermann Friedrich Graebe, déclare sous serment ce qui suit :

« De septembre 1941 à janvier 1944, j'exerçais les fonctions de directeur et d'ingénieur en chef de la succursale de Sdolbunow de l'entreprise de construction Josef Jung, à Solingen. En cette qualité, j'avais, entre autres, à visiter les chantiers de la maison. En vertu d'un contrat avec les services de construction de l'armée, celle-ci devait construire des entrepôts de céréales sur le terrain de l'ancien aérodrome de Dubno, en Ukraine. »

« Le 5 octobre 1942, lors de ma visite aux bureaux de construction de Dubno, mon chef d'équipe Hubert Moennikes, demeurant 21, Aussenmüelenweg à Hambourg-Haarbourg, me dit qu'à proximité des chantiers, des Juifs de Dubno avaient été fusillés dans trois grandes fosses d'une longueur d'environ 30 mètres et d'une profondeur de 3 mètres. Le nombre des personnes tuées par jour était d'environ 1.500. Les 5.000 Juifs qui avaient habité Dubno avant le pogrom étaient tous destinés à être liquidés. Les exécutions ayant eu lieu en présence de mon employé, il en restait péniblement impressionné. »

« Je me rendis alors sur les chantiers, accompagné de Moennikes, et je vis près de ceux-ci de grands remblais de terre, d'environ 30 mètres de long et 2 mètres de haut. Plusieurs camions stationnaient dans le voisinage immédiat. Des miliciens ukrainiens armés en faisaient descendre les gens sous la surveillance des soldats SS. Les mêmes miliciens étaient chargés de la garde et de la conduite des camions. Les gens dans les camions avaient sur le devant et dans le dos de leurs vêtements les pièces d'étoffe jaune réglementaires, qui permettaient de les identifier comme Juifs. »

« Moennikes et moi, nous nous dirigeâmes tout droit vers les fosses, sans en être empêchés. Quand nous nous approchâmes du remblai, j'entendis une série de coups de fusil se succédant de près. Les gens, descendus des camions - hommes, femmes et enfants - étaient forcés de se déshabiller sous la surveillance d'un soldat SS, cravache à la main. Ils étaient obligés de déposer les effets dans certains endroits : chaussures, vêtements et linge séparément. Je vis un tas de chaussures, environ 800 à 1 000 paires, de grandes piles de linge et de vêtements. Sans pleurer, ni gémir, ces gens se déshabillaient et se tenaient tout autour en se groupant par famille, en s'embrassant et en se faisant leurs adieux dans l'attente du signe d'un soldat SS qui se tenait debout au bord de la fosse, également une cravache à la main. Durant le quart d'heure que je restais là, je n'entendis pas une seule plainte ou une demande de grâce. J'observais une famille d'environ 8 membres : un homme et une femme âgés d'une cinquantaine d'années, entourés de leurs enfants d'environ 1, 8 et 10 ans, et de deux grandes filles d'environ 20 et 24 ans. Une vieille femme, aux cheveux tout blancs, tenait dans ses bras le bébé, le berçant et lui chantant une chanson. L'enfant, très satisfait, criait de joie. Les parents regardaient le groupe les larmes aux yeux. Le père tenait par la main le garçon de 10 ans, lui parlait doucement ; l'enfant luttait contre ses larmes. Puis le père leva le doigt vers le ciel et, caressant la tête du garçon, sembla lui expliquer quelque chose. A ce moment, le SS qui se tenait près de la fosse cria quelques mots à son camarade. Celui-ci compta une vingtaine de personnes et leur donna l'ordre d'aller derrière le remblai. La famille dont je viens de parler était parmi le groupe. Je me souviens encore de la jeune fille, mince et brune; qui en passant tout près de moi se désigna du doigt en faisant "23" ».

« Je fis le tour du remblai et me trouvai en face d'une fosse commune effroyable. Des corps étroitement serrés étaient empilés les uns sur les autres, de sorte que seules les têtes étaient visibles. La plupart étaient blessés à la tête, et le sang leur coulait sur les épaules. Quelques uns parmi les fusillés bougeaient encore. D'autres levaient les mains et tournaient la tête pour montrer qu'ils étaient encore vivants. La fosse était remplie aux deux tiers. J'évalue à un millier le nombre de corps qu'elle contenait. Je cherchai des yeux l'homme qui avait procédé à l'exécution. C'était un soldat SS, il était assis, les jambes ballantes, au bord de la fosse, un fusil-mitrailleur était posé sur ses genoux et il fumait une cigarette. Les gens, complètement nus, descendirent quelques marches qui étaient creusées dans la paroi argileuse, et se mirent à l'endroit indiqué par le SS. Étendus en face des morts ou des blessés, ils leur parlaient à mi-voix. Puis j'entendis une série de coups de fusil. Je regardai dans la fosse et vis des corps se contracter et des têtes déjà immobiles au-dessus des corps qui gisaient devant eux. Le sang coulait de leurs nuques. J'étais étonné de ne pas recevoir l'ordre de quitter les lieux, mais je remarquai à proximité des victimes deux ou trois postiers en uniforme. Une nouvelle fournée de victimes approchait de l'endroit. Elles descendirent dans la fosse, s'alignèrent en face des victimes précédentes et furent fusillées. »

« Sur le chemin du retour, en contournant le remblai, je vis un nouveau camion, rempli de gens qui venait d'arriver. Cette fois il ne contenait que des malades ou des infirmes. Des femmes déjà nues étaient en train de déshabiller une vieille femme, au corps décharné, aux jambes d'une maigreur effroyable. Elle était soutenue par deux personnes et semblait paralysée. Les gens nus la conduisirent derrière le remblai. Je quittai les lieux en compagnie de Moennikes et regagnais Dubno en voiture. »

« Le lendemain matin, en retournant au chantier, je vis une trentaine de corps nus gisant à trente ou cinquante mètres de la fosse. Quelques uns étaient encore vivants ; ils fixaient l'espace d'un regard figé, semblant ne pas réagir à la fraîcheur du matin et ne pas voir nos ouvriers qui se tenaient tout autour. Une jeune fille d'une vingtaine d'années m'adressa la parole, me demandant de lui apporter des vêtements et de l'aider à s'évader. A ce moment, nous entendîmes le bruit d'une voiture qui s'approchait à toute allure ; je vis que c'était un détachement de SS. Je regagnais mes chantiers. Dix minutes après, des coups de fusil retentirent à côté de la fosse. Les Juifs qui étaient encore vivants avaient reçu l'ordre de jeter les cadavres dans la fosse, puis ils durent s'y coucher eux-mêmes pour recevoir un coup de pistolet à la nuque. »

« Signé: GRAEBE
Wiesbaden, le 10 novembre 1945 »

NCA V, pp.696-699. - N.D., 2992-PS. Dans Poliakov « Bréviaire de la haine », pages 143-145

8.8. « Les camions de la mort »

Lettre du Dr August Becker au SS-Obersturmbannführer Rauff à Berlin, le 16 mai 1942. (Extraits)

Becker est le spécialiste allemand de la mise à mort des être humains par gaz dans le cadre de l'opération dite d'Euthanasie (action T.4) au cour de laquelle des dizaines de milliers de malades mentaux et d'handicapés furent assassinés. Après la fin de sa mission dans le cadre de l'action T 4, il est affecté aux questions techniques des gazages à l'Est. Fin 1941 et début 1942, il a visité tous les Einsatzgruppen opérant en URSS avec des camions à gaz pour tuer femmes et enfants juifs et tziganes. Ceci est l'un de ses rapports...

Kiev, le 16 mai 1942
Affaires secrètes du Reich
Au SS-Obersturmführer Rauff,
Berlin, Prinz Albrechts, 8

« La révision des fourgons des Groupes D et C est achevée. Alors que les fourgons de la première série peuvent être utilisés même par mauvais temps (mais pas trop), les fourgons de la deuxième série (Saurer) s'embourbent complètement par temps de pluie. Par exemple, lorsqu'il a plu, ne serait-ce qu'une demi-heure, le fourgon est inutilisable, il se met à déraper. Il n'est possible de s'en servir que par temps tout à fait sec. La seule question qui se pose est celle de savoir si l'on peut se servir du fourgon sur le lieu même de l'exécution lorsqu'il est immobile. D'abord le fourgon doit être amené sur place, ce qui n'est possible que par beau temps. Le lieu de l'exécution se trouve en général éloigné de dix à quinze kilomètres des routes principales, donc d'accès difficile. D'accès impossible lorsque le temps est humide ou pluvieux. Si les gens à exécuter sont conduits par camion ou amenés à pied, ils comprennent immédiatement ce qui va arriver, et ils s'agitent, ce qu'il convient d'éviter autant que possible. Il ne reste que la seule solution qui consiste à les charger dans les fourgons sur le lieu du rassemblement et de les amener alors au lieu de l'exécution.

J'ai donné l'ordre de camoufler les fourgons du groupe D en roulottes, en plaçant de chaque côté des plus petits une paire de volets, deux paires de volets sur les plus grands, comme on peut en voir fréquemment aux fermes dans les campagnes. Ces fourgons sont devenus si connus que non seulement les autorités, mais aussi la population civile les appelaient « les camions de la mort » dès qu'ils faisaient leur apparition. A mon avis, on ne peut empêcher longtemps ces fourgons d'être reconnus, même camouflés. [...]

A cause du terrain accidenté et de l'état indescriptible des chemins et des routes, les joints d'étanchéité et les rivets finissent par lâcher. On m'a demandé si dans ce cas, il faudrait amener les fourgons à Berlin pour les réparer. Le transport à Berlin est trop cher et demanderait trop de carburant. Pour éviter ces dépenses, j'ai ordonné d'effectuer des soudures pour les petites fuites et lorsque ce s'avérerait impossible, de faire immédiatement savoir à Berlin, par TSF, que le Pol. n°... était hors service.

De plus, j'ai ordonné qu'au moment des gazages les hommes soient tenus aussi loin que possible des fourgons afin de ne pas exposer leur santé à des émanations éventuelles de gaz. J'aimerais saisir cette occasion pour attirer votre attention sur les remarques suivantes : plusieurs commandos font effectuer le déchargement des fourgons après le gazage par leurs propres hommes. J'ai fait remarquer aux commandants des commandos spéciaux concernés les dommages tant moraux que physiques qu'encourent ces hommes, sinon immédiatement du moins par la suite. Les hommes venaient se plaindre à moi de maux de tête qui apparaissaient après chaque déchargement. On ne veut pourtant pas modifier cet ordre, parce que l'on craint que les détenus employés à ce travail ne puissent choisir un moment favorable pour prendre la fuite. Pour protéger les hommes contre ces inconvénients, je demande que des ordres soient donnés en conséquence.

Le gazage n'est pas effectué comme il le devrait. Dans le but d'en finir le plus vite possible, le conducteur appuie au maximum sur l'accélérateur. Ce faisant, les individus à exécuter meurent d'asphyxie au lieu de mourir par perte de conscience comme prévu. Mes instructions ont à présent démontré que par un ajustement adéquat des leviers, la mort survient plus rapidement et les prisonniers s'endorment calmement. Visages convulsés et excréments ne surviennent plus, comme c'était le cas auparavant.

Je poursuis aujourd'hui mon voyage vers le groupe B où un prochain courrier pourra m'atteindre.

Dr Becker, SS-Untersturmführer. Document Nuremberg PS 501.

8.9. Note pour l’entretien des camions à gaz

« Pour un nettoyage facile du véhicule, il faut disposer au milieu du plancher d’un trou de vidange bien étanche. Le couvercle du trou, d'un diamètre de 200 à 300 mm, sera pourvu d'un siphon couché, de façon à ce que les liquides fluides puissent déjà s'écouler pendant le fonctionnement. Au moment du nettoyage, le trou de vidange servira à l'écoulement des grosses saletés. Les changements techniques mentionnés ci-dessus doivent être apportés aux véhicules en service uniquement au moment où ceux-ci auront besoin d'être réparés. Quant aux dix véhicules neufs commandés chez Saurer, ils devront dans toute la mesure du possible être aménagés avec toutes les innovations et changements déduits de la pratique et de l'expérience. » Soumis à la décision du Gruppenleiter II D, SS-Obersturmbannführer Walter Rauff. Signé Just.
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