STOSKOPFF Sébastien
3. Eléments biographiques
Le texte de Sandrart de 1675
La vie de Stoskopff
3.2. La vie de Stoskopff
3.2.1. L’apprentissage
Stoskopff Sébastien : Verre, fruits et coquillage. Œuvre signée et datée 1644. Huile sur toile. 35 x 33cm. Collection privée. (Histoire de l’art) |
En 1614 Georg Stoskopff fait une demande au conseil de la ville afin qu’il prenne en charge la formation de son fils, compte tenu de ses dons pour la peinture et l’architecture ; la ville accepte et s’engage à financer les études du jeune Sébastien sur une période de 5 ans. Georg meurt peu après. En 1615 Sébastien part à Hanau en formation auprès d’un maître wallon, Daniel Soreau, peintre de talent, grand spécialiste des natures mortes et homme par ailleurs fort estimé dans la ville alsacienne où il fait de fréquents séjours ; Stoskopff se forme durant cinq ans à la peinture, à l’architecture et aux autres beaux arts.
Stoskopff Sébastien : Boite en bois avec verre et citron. Œuvre signée. Huile sur toile, 30,2 x 27,7cm. Stockholm, collection privée. (Histoire de l’art) |
Soreau meurt en mars 1619. Stoskopff s’occupe alors de l’atelier du maître avec les fils de Soreau, Isaac et Peter, achève ses œuvres et s’occupe de la formation des apprentis, parmi lesquels se trouve le jeune Sandrart. Il reste à Hanau au moins jusqu’en décembre 1620, date de la fin de son contrat avec Strasbourg, et probablement jusqu’à la mort de la veuve de Soreau en septembre 1621. Il pense alors s’installer dans la région de Mayence, mais il n’obtient pas les habilitations nécessaires. Aussi part-il pour la France et pour sa capitale, Paris.
3.2.2. Le séjour parisien
Stoskopff Sébastien : Verres, cruche, pain et fruits. Œuvre signée et datée 1627. Huile sur toile, 50 x 60 cm. Cologne, Wallraf-Richartz-Museum. (Histoire de l’art) |
Au début du XVIIè siècle, le quartier autour de l’église Saint Germain se situe hors des remparts de la ville. Le strict règlement des corporations interdit alors aux étrangers de demeurer dans la cité même ; aussi de nombreux artistes étrangers se regroupent là , particulièrement des peintres ayant fui les Flandres à cause de leur religion : c’est probablement dans ces milieux que l’art français de la nature morte va trouver une des ses sources principales. L’analyse des œuvres de Stoskopff démontre qu’à cette époque il fréquente des artistes anversois comme Pieter van Boucle (1610-1673) et Jean-Michel Picart (1600-1682) mais aussi des peintres français de nature morte tels Jacques Linard (1597-1645), Lubin Baugin (1610-1663) et Louise Moillon (1610-1685).
La première œuvre de Stoskopff authentifiée avec certitude, la somptueuse « Nature morte aux livres et à la chandelle » (Rotterdam, musée Boymans van Beuningen), date de 1625.
A la fin de la décennie, sans doute en 1628, il voyage en Italie, où sa présence est attestée en 1629 à Venise. Il subit l’influence de l’école du Caravage.
Stoskopff Sébastien : Nature morte à la langouste. (Histoire de l’art) |
Dès 1630, le voici de retour à Paris, où il demeure durant une dizaine d’années. Il habite alors dans le Marais, près de la rue Vieille du Temple, et connaît une notoriété certaine comme le suggère la présence de ses œuvres dans les plus grandes collections de l’époque. Il crée des « tables mises » et des cuisines très originales qui s’inscrivent dans l’évolution de la production parisienne de Linard, Baugin et Moillon avec lesquels il entretient d’étroites relations. Il diffère cependant d’eux dans la composition et dans le traitement particulier de la lumière.
De Paris, il se rend en 1633 à Troyes, où il se met au service du Baron Guichard du Vouldy et travaille dans son château. La preuve en est un récit contant l’échec d’une tentative de conversion au catholicisme par un avocat de la ville… De même il est probable qu’il ait séjourné à la cour de Lorraine, au vu de l’inventaire d’un certain Jean-Baptiste de Bretagne, commissaire des guerres et marchand d’art en Lorraine, inventaire daté de 1650 et faisant état de 22 œuvres du peintre.
Le fait que Stoskopff ait travaillé pour plusieurs cours ou plusieurs princes s’explique aisément : son statut d’étranger à Paris, sans droit de séjour sur une longue durée ne lui permet pas de s’établir définitivement dans la ville, et les séjours dans des cours et châteaux de princes sont pour lui une opportunité très intéressante. C’est probablement aussi la raison pour laquelle il finit par revenir à Strasbourg sans doute à la fin de l’année 1640.
3.2.3. Le retour à Strasbourg
Stoskopff Sébastien : Nature morte aux fruits, pain, cruche et verre. Huile sur bois, 27,5 x 36,5cm. Collection privée. (Histoire de l’art) |
Stoskopff à visiblement l’intention de s’installer définitivement dans la ville alsacienne puisque le 11 février 1641 il entre dans la corporation des orfèvres, artisans d’art et peintres de la ville « Zur Steltz ». Rapidement éclate au sein de la corporation une querelle : le nouveau membre doit-il réaliser un « chef d’œuvre » pour celle-ci ? Cette querelle est vraisemblablement alimentée par quelques membres du « poêle », qui voient, non sans quelque raison, un redoutable concurrent s’installer parmi eux… Les débats se prolongent fort longtemps ; mais le 13 octobre 1642 Stoskopff, qui entre temps a acquis grande notoriété dans la ville, offre au « Conseil des Quinze » une toile pour leur grande salle de délibération : émerveillés, les « Quinze » ordonnent à la corporation de cesser la dispute et la « Monnaie » de la cité dédommage l’artiste pour son œuvre extraordinaire « über die massen schones Kunstgemähl… » Cette œuvre, une nature morte dans une cuisine, sera accrochée dans la salle du conseil de la ville, mais sera malheureusement détruite dans l’incendie de l’Hôtel de ville lors des évènements de juillet 1789.
Stoskopff Sébastien : Nature morte à la pipe. Huile sur toile, 42,5 x 58,2cm. Collection privée, USA. (Histoire de l’art) |
Les œuvres de la période strasbourgeoise sont marquées à la fois par la continuité et par l’innovation : les scènes de cuisine, les déjeuners sont toujours présents, de même que les vanités dont il donne avec la « Grande Vanité » (1641, Strasbourg, musée de l’Œuvre Notre-Dame) une interprétation magistrale. Mais des sujets nouveaux apparaissent : les pièces d’orfèvrerie et les corbeilles de verres en cristal vénitien et de saisissants trompe-l’œil.
3.2.4. Au service du prince de Nassau Idstein
Stoskopff Sébastien : Les cinq sens et l’horloge. Nature morte. National Portland Museum, Oregon. (Histoire de l’art) |
A Idstein, Stoskopff n’est pas officiellement peintre de la cour du comte et ne loge pas, contrairement à d’autres artistes, dans le château. Il demeure dans une auberge à proximité, « Zum Löwen ». C’est là qu’il meurt brutalement début février 1657. Mort entourée de mystère : les actes de l’église paroissiale d’Idstein rapportent qu’il est enterré le 11 février 1657, très discrètement, car mort sans doute d’un coma éthylique suite à une beuverie « sich an Brandewein zu tod gesoffen »… Cette mort est entachée d’un grand mystère, car mêlée de sorcellerie : de nombreux bruits courent après sa disparition, bruits parlant d’un assassinat de l’artiste par l’aubergiste Balthasar Moyses… Moyses est interrogé, mais n’est pas inquiété outre mesure…
Tragique épisode 20 ans plus tard : accusé de satanisme lors d’un procès en sorcellerie par une veuve elle aussi incriminée, Moyses avoue avoir eu droit aux remerciements de Satan pour avoir tué Stoskopff. L’inquisition le condamne à être brûlé vif.