L’idéologie de Hitler
1. Introduction
Les sources
L’expérience de la défaite
1.1. Les sources
La « pensée » de Hitler se trouve dans les deux tomes de « Mein Kampf », publiés respectivement en 1925 et 1929. Le premier a été dicté par Hitler à ses collaborateurs (Hess, Stämpfle) et revu par eux en 1924, pendant son séjour en prison après l’échec du putsch avorté de 1923. C’est une présentation sommaire, confuse et décousue de se politique. Le second, plus ambitieux, a été rédigé après sa libération, en 1925. Il se présente comme un exposé des bases scientifiques « et » philosophiques - de la « doctrine » nazie. Malgré ou à cause de cette prétention, il est presque aussi sommaire, tout aussi confus et encore plus décousu que le précédent.
La seconde source directe est le « Zweites Buch » de Hitler, ouvrage dicté en 1928 après l’échec cuisant des nazis aux élections et à propos de la question du Tyrol du Sud, appartenant alors à l’Italie de Mussolini. Dans ce « second livre », Hitler se livre plus sur sa politique extérieure, prévoyant notamment un nouveau conflit mondial pour… 1980 et opposant pour la domination du monde, l’Allemagne et son alliée l’Angleterre aux Etats-Unis… Ce « second livre », jamais publié, sera découvert en 1945 par les alliés
« Mein Kampf » et le « Zweites Buch » forment donc l’ensemble de l’idéologie hitlérienne dans lesquels sont exposées en long, en large et en travers, les théories fumeuses sur la race, le peuple élu et l’espace vital, en un ridicule salmigondis qui en d’autres temps serait passé totalement inaperçu si les circonstances dramatiques de l’Histoire mais aussi l’intelligence tactique de son auteur ne l’avaient fait adopter par les millions d’Allemands, de l’ouvrier à l’intellectuel, du paysan à l’universitaire…
Cette idéologie hitlérienne, acquise dès ses années « viennoises », confirmées par le traumatisme de la défaite de 1918, expérimentées dès l’après guerre dans les brasseries munichoises, est d’une constance remarquable, à partir de 1920 et jusque dans les derniers jours d’avril 1945. Elle révèle
On observe chez Hitler une obsession récurrente : celle de l’idéal de la communauté nationale unitaire, de la pureté du sang germanique, de la grandeur historique d'une seule race, le tout motivé par sa haine féroce et jusqu’auboutiste des Juifs, uniques responsables de la situation catastrophique dans laquelle se trouve plongée l’Allemagne...
Ce délire paranoïde et mégalomane est cependant cohérent, car il est organisé, structuré par la recherche obsédée d'un responsable ultime, d'un principe du mal expliquant les malheurs du temps, même si Hitler n’a jamais défini véritablement son idéologie de manière systématique et suivie. Car derrière une certaine obscurité conceptuelle et un style plus que douteux apparaît toujours une grande clarté du contenu et une grande cohérence.
De plus, si la paranoïa est évidente, elle n’explique pas tout. Pour comprendre cette violence du discours et le succès du nazisme après la grande crise de 1929, il faut naturellement tenir compte de bien d’autres causes structurelles et conjoncturelles : le lourd passé allemand, le nationalisme, l’antisémitisme et le racisme exaspérés par l’humiliation de la défaite et par les maladresses des Alliés, l’absence de tradition démocratique, le caractère dévastateur des crises successives qui frappent l’Allemagne de Weimar, mais aussi de nouvelles méthodes de domination utilisées à grande échelle par un parti galvanisé, l’alliance de la terreur et de la propagande, de la violence et de la « publicité », du discours et de l’action...
Le destin de l'Allemagne sera scellé le jour où la petite bourgeoisie, des millions de chômeurs désorientés et une bonne partie des militaires et de la grande bourgeoisie ont reconnu leurs obsessions et ont cru trouver le salut dans les imprécations simplificatrices du discours hitlérien.
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