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Le système concentrationnaire nazi

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3. L’histoire des camps

Etape 1: la terreur politique et totalitaire : 1933-1937
Etape 2: 1938-1942
Etape 3: l’apogée des camps et la Solution Finale : hiver 41 – automne 44
Etape 4: la crise finale, automne 1944 – mai 1945

3.3. Etape 3: l’apogée des camps et la Solution Finale : hiver 41 – automne 44

3.3.1. L’aggravation de la terreur

Suite à l'opération Barbarossa et à la mondialisation du conflit, et bien que la domination du Reich s’étende désormais à tout le continent ou presque, le réseau des camps déjà tissé est si dense que le nombre de camps n’augmente plus guère. Par contre les effectifs des camps et surtout des commandos continuent à gonfler, car la résistance acharnée de l’Armée rouge et le développement des luttes clandestines dans tous les pays occupés obligent les nazis à développer et à durcir encore la répression à l’échelle européenne. Ce durcissement se ressent à l’intérieur du camp et les conditions de vie ne vont cesser de se dégrader jusqu’à la fin, la perspective d’une défaite rendant les SS de plus en plus durs…

L’aggravation de la terreur est très rapide ; c’est d’abord, le 13 mai 1941, le « Kommissarbefehl » (qui sera officialisé le 6 juin) : « Le caractère que présente notre guerre contre la Russie est tel qu'il doit exclure les formes chevaleresques... L'idéologie soviétique est aux antipodes de celle qui régit le national-socialisme... Par conséquent, les Soviets (Commissaires politiques) doivent être liquidés. Les soldats allemands coupables de contrevenir aux lois internationales de la guerre seront innocentés... ». Le « Kommissarbefehl » est mis en oeuvre par le général Keitel. Un accord entre la Wehrmacht et les SS prévoit une coopération sur le terrain. C’est ensuite, le 7 décembre 1941, le décret de l’OKW signé Keitel, le décret « Nacht und Nebel », « Nuit et brouillard », (citation d’une phrase musicale de Wagner, empruntée à une scène de « l’Or du Rhin », au cours de laquelle le nain Alberich devient invisible), qui ordonne de déporter sans jugement et dans le plus grand secret, sans laisser filtrer aucune nouvelle, tout adversaire de l’État national-socialiste, c’est-à-dire tout résistant potentiel. L’arrivée de nombreux détenus portant sur leurs vêtements les lettres « N.N. » a beaucoup frappé les autres déportés et ces lettres mystérieuses jouent un grand rôle dans l’imaginaire des camps.

3.3.2. La primauté de la finalité économique : les « camps de la mort lente »

Surtout, la finalité des camps est revue : les nécessités de la guerre et le manque de main-d’oeuvre conduisent les dirigeants SS à mobiliser la force de travail de l’immense masse des déportés au service de l’économie du Reich. Certes, les SS utilisent déjà depuis longtemps les détenus au travail, pour la construction et l’aménagement intérieur des camps, ou même pour travailler à l’extérieur. Ils louent très facilement des commandos d’esclaves à des industriels qui apprécient cette main-d’oeuvre bon marché et corvéable à merci. Les salaires gagnés sont versés aux SS et vont d’ailleurs plus souvent dans leurs poches que dans les caisses du camp.

En septembre 1941, Oswald Pohl, le chef du WVHA (« SS-Wirtschafts- und Verwaltungshauptamt » « office central d'administration économique ») décide de mettre fin à ces pratiques douteuses et de réorganiser le service du travail pour l’orienter vers l’effort de guerre. En mars 1942, les camps sont détachés du RSHA d’Heydrich et placés sous l’autorité de Pohl et du VWHA. Pohl fixe immédiatement les objectifs : l’extermination par le travail : « Le commandant du camp est seul responsable de l'emploi de la main-d'oeuvre disponible. Cet emploi doit être total au sens propre du mot, afin d'obtenir le rendement maximum... Il n'y a pas de limite à la durée du travail...Toutes les circonstances qui pourraient entraîner un raccourcissement de la durée du travail doivent en conséquence être restreintes à un strict minimum... » (Oswald POHL, directive aux commandants des camps, fin avril 42). La circulaire Pohl s'inscrit dans la logique du système: une mise à disposition absolue du corps des détenus à leurs maîtres S.S. : ceux-ci disposent non seulement du concours d'une partie du corps médical de la Wehrmacht (prisonniers de guerre soviétiques, décret « NN »), mais encore celui de l'industrie allemande : ainsi les cadres industriels allemands « endossent » moralement l'uniforme S.S. avec une étonnante facilité : Krupp, I.G. Farben, Siemens et une quantité de petites firmes possédant ateliers et usines dans le Wartheland et dans le Gouvernement général...

La directive de Pohl est très révélatrice de la contradiction fondamentale entre les nécessités économiques et idéologiques, car l’idéologie prime : en effet, le transfert du secteur policier au secteur économique aurait pu être bénéfique, si les SS s’étaient souciés le de ménager leurs prisonniers dans l’intérêt de la production. Les détenus sont généralement affectés aux tâches les plus dures dans les pires conditions ; de plus, comme le régime disciplinaire ne se modifie pas, les chances de survie sont souvent réduites à quelques mois, surtout dans les commandos les plus durs comme par exemple dans les tunnels de Dora ou d’Ebensee, les mines de sel de Helmstedt, les câbles de Monowitz et bien d’autres… Les résultats ont été dans l’ensemble désastreux dans les camps de concentration proprement dits.

3.3.3. La mise en oeuvre de la « solution finale »

3.3.3.1. La situation début 1941

La décision de passer à la « solution finale », c'est-à-dire l’extermination des Juifs, se situe dans le droit fil de la logique des discours véhéments et des appels au meurtre proférés chaque jour ou presque depuis plus de vingt ans par tous les nazis. Elle tranche cependant singulièrement avec la politique de réalisme cynique adoptée et suivie entre 1933 et 1940. Jusqu’à l’automne 1941 encore, le régime pousse les juifs à l’émigration.

Un pas de plus est franchi au début de la guerre et à peu prés au même moment en Allemagne et en Pologne lorsque Hitler décide d’une part la liquidation dans le Reich des aliénés, des malades incurables et des bouches inutiles en septembre 1939, et que d’autre part en Pologne les premiers « Einsatzkommandos SS » commencent à massacrer et à décimer les Juifs et l’élite polonaise, mais de manière encore « artisanale ». Mais ces agissements entraînent à ce moment là encore de nombreuses protestations : en Allemagne l’émotion du public et les protestations des évêques obligent Hitler à reculer l’opération « T4 », l’élimination des malades mentaux (il poursuivra l’opération sous une autre forme), alors qu’en Pologne les vives réactions du gouverneur Franck et de généraux comme Von Blaskowitz contre les excès de SS s’élèvent contre ces « désordres déplorables pour le moral de la troupe et pour la discipline » (mais pas du tout d’ordre humanitaire…).

Au printemps 1941, ces considérations ne sont plus de mise : la politique d’émigration a échoué. Le Reich est à la veille de l’affrontement majeur pour la domination du monde, d’une lutte à mort contre le judéo-bolchévisme stalinien. Pour Hitler, la guerre va être une guerre idéologique et une guerre d'anéantissement « ein Vernichtungskrieg » des judéo-bolcheviks... Toutes les règles d'une guerre normale doivent être oubliées (discours au généraux du 30 mars 1941). Le temps n’est plus à la mesure ni à la prudence qu’avaient jusque-là affiché malgré la profondeur de l’antisémitisme de Hitler, la paranoïa du groupe dirigeant et la conjoncture internationale.

Une première décision est prise au printemps 1941 durant la préparation de l’offensive contre l'URSS : celle de former des groupes d’intervention SS, les « Einsatzgruppen » chargés, sur les talons de la Wehrmacht, de débusquer et de liquider les Juifs, les commissaires politiques et les partisans. Ces unités très spéciales vont assassiner dès les premiers mois de la guerre des centaines de milliers d’hommes, de femmes et d’enfants, souvent avec l’aide de soldats de la Wehrmacht et de milices auxiliaires recrutées parmi les antisémites locaux en Ukraine et dans les pays baltes. Qu’il suffise de rappeler ici le massacre de 33 000 juifs à Babi Yar près de Kiev les 29 et 30 septembre 1941, ou le massacre des 48 000 juifs de la région d’Odessa par les troupes roumaines, alliés de Allemands…

Nouvelle étape : le 30 juillet 1941, Goering confie à Heydrich le soin de préparer « une solution finale (« Gesamtlösung ») de la question juive dans les territoires européens sous l’influence allemande ». Heydrich envisage d’abord, semble-t-il de déporter les Juifs au-delà de Lublin, dans la zone d’action des « Einsatzgruppen ». Il aurait même envisagé de déporter tous les Juifs en Sibérie, lorsque l’ogre russe aurait été vaincu…

3.3.3.2. La décision finale : automne 1941

Mais ce projet va rapidement être dépassé. En effet, malgré la fulgurante marche en avant de la Wehrmacht et les victoires qui se succèdent en Russie, après presque trois mois de guerre, l’armée soviétique ne s’est pas effondrée. Mieux, elle résiste plutôt bien. Hitler s’en rend compte. Il est même certain, avec l'entrée en guerre des Américains qu’il sait inéluctable, que la guerre sera mondiale et longue... et qu'il ne la gagnera pas forcément. Ce sentiment d'échec potentiel le décide à résoudre radicalement la « question juive », par la destruction physique. Le 18 septembre, Himmler annonce à ses officiers la décision de Hitler de déporter tous les Juifs des territoires sous contrôle Allemand « vers l'Est ». Cette date marque la volonté claire du Führer de recourir à la mise à mort directe ou différée des Juifs. L'« Endlösung der Judenfrage » signifie désormais « Mise à mort ». L’échec devant Moscou puis la retraite de la Wehrmacht en décembre 19 42 ne fait que conforter le Führer dans sa décision.

Aussitôt, la machine se met en route, marquée par quelques « temps forts » : le 28 septembre, Birkenau change de fonction sur ordre de Himmler : le camp est désormais voué à devenir un camp d’extermination, un camp de l’« Endlösung der Judenfrage »… Auschwitz devient ainsi un « camp mixte » (destruction directe et destruction par le travail). Il en sera de même pour le camp de Lublin-Majdanek et pour le camp de Stutthof aux premières semaines de l’année 1942. Toujours en octobre 1941, Himmler décide la création sur le Bug de trois centres d’extermination dont le seul objectif est le gazage de centaines de milliers de Juifs : Belzec (premiers travaux le 1 novembre), Sobibor, Treblinka, alors qu’à Chelmno débute, dès le 9 décembre 1941 l’extermination systématique des Juifs du Warthegau annexé au Grand Reich... Mi octobre débute la déportation en masse des juifs du Grand Reich « vers l’est » Ces juifs seront « stockés », en attendant le fonctionnement des centres de destruction, dans des ghettos des territoires incorporés (Lvov, Minsk, Varsovie, Lodz, Theresienstadt...) Ils seront bientôt suivis par les Juifs de Hollande, puis de France… Le 23 octobre, sur ordre de Himmler, le chef de la Gestapo Müller interdit l'émigration de tout Juif hors d'Europe.

En même temps, les massacres des « Einsatzgruppen » se systématisent et se transforment en véritable génocide : c’est la « guerre contre les Juifs » : le 3 novembre 10 000 Juifs sont abattus à Trawniki, 15 000 à Poniatowa, 17 000 à Maïdaneck. Le même jour parvient le rapport de l’Einsatzgruppe C : 75 000 juifs exterminés à ce jour ; le 5, c’est le massacre de 15 000 Juifs par les Allemands à Rovno, en Volhynie ; le 27, en deux « assauts », le chef suprême des SS et de la Police Jeckeln fait exécuter 27 800 juifs du ghetto de Riga. Ils seront remplacés par des Juifs du Reich, particulièrement ceux de Berlin…

Parallèlement des centaines et des centaines de camps de travail forcé sont construits en Pologne, dont le but désormais clairement déclaré est de faire mourir des milliers de « Juifs du travail » sur des chantiers, dans des ateliers, dans des mines, en les soumettant aux conditions les plus difficiles, à la faim et aux pires brutalités. Dans les camps « traditionnels », les Juifs sont soumis aux travaux les plus durs et aux brimades les plus brutales. Ils ont tous droit à des « traitements spéciaux », beaucoup plus durs, à seule fin de l’élimination physique. Les chances de survie d’un « Juif du travail » dans un camp ou un commando sont dix fois moindres que celle d’un politique, d’un droit commun ou même d’un homosexuel…

3.3.3.3. Wannsee, janvier 1942

Le « point d’orgue » est atteint lors de la mise en place définitive de la décision d’extermination, la conférence de Wannsee, réunie le 20 janvier 1942 à Berlin. Il s’agit d’organiser l’évacuation de l'ensemble des Juifs européens (estimés à 11 millions) vers les territoires de l'Est, l’élimination de la plus grande partie d’entre eux par le travail (constructions de routes, d’usines, de fortifications, travaux en forêt, dans les mines…) et le « traitement » des autres « de manière à ne pas pourvoir former comme cela a été le cas au cours de l'histoire, le noyau d'une renaissance juive »…

Ainsi une quinzaine de hauts dignitaires du régime organisent, selon le désir du Führer et l’ordre de Himmler, l’acheminement de tous les Juifs des pays occupés vers les camps d’extermination polonais. Les premiers convois formés en Allemagne sont d’ailleurs déjà en route. Ils se multiplient un peu partout à partir du printemps 1942, alors que Belzec, Sobibor et Treblinka se mettent en route. La machine était désormais lancée. Elle va fonctionner à plein rendement jusqu’à l’automne 1944.

3.3.3.4. Conclusion

Les deux séries de mesures au départ, celles de Pohl pour les camps et celle de Heydrich pour les Juifs n'ont pas la même finalité : la solution finale vise à l'élimination des « races inférieures » au premier rang desquelles se trouve la race juive ; le système concentrationnaire est fondé sur la volonté d'écarter et de redresser les opposants. Mais lorsque les deux séries se rencontrent, elles échangent leurs finalités, c'est-à-dire la possibilité de survie pour les « races inférieures » et la destruction pour les concentrationnaires. De fait, cela aboutit à un immense gaspillage de la force de travail et une énorme sous productivité (désorganisation du travail, mauvaises affectations, sous alimentation, détournement du bénéfice du travail au profit exclusif de la S.S. et de Himmler...) L'intérêt principal du WVHA, donc des SS et de Himmler dans la location de la force du travail, est l'enrichissement de l’Ordre Noir et de sa hiérarchie ; d’ailleurs l'élite de la race aryenne se distinguera dans la prévarication et le pillage.

Cette contradiction entre les nécessités économiques et idéologiques va miner le national socialisme et le mener à sa perte. Le tragique de l'aventure hitlérienne, c'est que sa défaite soit venue de cette contradiction économique, et non de la contestation radicale des valeurs éthiques et humanistes. Le système concentrationnaire ne signifia en aucune manière l'essor de l'industrie allemande. Il permit hélas aux industriels allemands de s'aventurer dans un domaine fantomatique constitué en dehors de la société réelle : ils seront happés eux aussi par ce monde irréel qui n'a aucune commune mesure avec un monde édifié sous l'empire de la rationalité et de l'utilité, au point d'adopter les méthodes des gardes chiourmes S.S...



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