Le ghetto de Kolomyja
3. Les premiers massacres
Le 11 octobre 1941, tous les enseignants juifs sont arrĂȘtĂ©s par les SS et incarcĂ©rĂ© en prison oĂč ils rejoignent beaucoup d'autres juifs dĂ©jĂ dĂ©tenus. Les listes de noms et des adresses avaient Ă©tĂ© Ă©tablies par des informateurs ukrainiens et polonais. Dans la prison, les Allemands demandent des volontaires pour le travail. Beaucoup se portent volontaires pour Ă©chapper aux mauvais traitements dans la prison. Parmi eux, un petit groupe de jeunes juifs sont amenĂ©s dans la forĂȘt de Szeparowice aux environs de la ville oĂč ils sont forcĂ©s de creuser de profondes fosses. En soirĂ©e, tous sont abattus. Les dĂ©tenus de la prison n'ont ni nourriture ni eau, et les provisions que leur envoient le Judenrat sont volĂ©es par les gardes ou donnĂ©es aux non-juifs. Le 12 octobre, le jour du Yom Kippour, la Schupo, les SD et la police auxiliaire chassent les juifs de leurs maisons dans les rues et les arrĂȘtent. Des forces allemandes de sĂ©curitĂ© pĂ©nĂštrent dans la synagogue, interrompent le service religieux et incendient le bĂątiment. Puis plus de 3.000 hommes, femmes, et enfants sont emmenĂ©s dans la forĂȘt de Szeparowice . LĂ ils sont exĂ©cutĂ©s au bord des fosses creusĂ©es la veille.
Les anciens policiers de la Schupo Franz Stanka et Franz Straka ont dĂ©taillĂ© le massacre hebdomadaire systĂ©matique des juifs de Kolomyja, dans la forĂȘt de Szeparowice, dans le cimetiĂšre et dans les abattoirs. Jacob Uitz a dĂ©clarĂ© que son dĂ©tachement de police a tuĂ© plus de 15.000 juifs Ă Kolomyja. Franz Pernek a tentĂ© des se pendre dans sa cellule, mais pris de remords, a dĂ©crit plus tard ce qui se passait Ă Kolomyja ; il confirme les liquidations dans la forĂȘt ainsi que l'utilisation des chiens dressĂ©s Ă tuer. Le lieutenant Karl Gross a refusĂ© de participer aux massacres, et sera exclu des futures actions sans quâune mesure disciplinaire ne soit Ă©tĂ© prise contre lui. Tous les accusĂ©s confirment les massacres des Juifs et leur participation aux dĂ©portations vers Belzec dans les districts de Kuty, Kosow, Jablonow, Pistyn, Peczenizyn, Horodenka, Czernelica, Gwozdziec, Zablotow et Zabie. LâaccusĂ© Othmar Kleinbauer avoue : « En 1942, jâai commandĂ© une « Aktion » dans le cimetiĂšre juif de Kolomyja quand des hommes, les femmes et les enfants ont Ă©tĂ© liquidĂ©s. Pernek a donnĂ© l'ordre aux juifs dâĂŽter tous leurs vĂȘtements et aux vieux dâaller au bord de la fosse. Pernek a criĂ©, « avancez, descendez dans la fosse, cela ne fera pas mal ! Plus vous serez rapides, meilleur ce sera pour vous ! » Les gens ont reçu lâordre de se coucher sur le ventre dans la fosse, puis on leur a tirĂ© une balle dans la tĂȘte. J'ai vu les rĂ©sultats des balles explosives « dumdum » qui fracassent les tĂȘtes, rendant les gens mĂ©connaissables. Environ 40 personnes encore, vieux hommes et femmes ont Ă©tĂ© amenĂ©s au cimetiĂšre. J'ai donnĂ© ordre pour que tous se dĂ©shabillent et se rendent prĂšs de la fosse. Ils ont dĂ» se coucher sur le bord, et non l'intĂ©rieur de la fosse et ont Ă©tĂ© tuĂ©s. » Franz Schipany, autre policier, tĂ©moigne : « En automne 1941, les juifs ont Ă©tĂ© arrĂȘtĂ©s dans le ghetto et conduits Ă la prison. De lĂ , ils ont Ă©tĂ© obligĂ©s de marcher jusque dans la forĂȘt de Szeparowice, oĂč ils ont Ă©tĂ© liquidĂ©s par le SD. Les juifs ont descendre nus dans une fosse sable, se coucher sur le ventre et je leur ai tirĂ© une balle dans la tĂȘte. J'ai effectuĂ© d'autres liquidations dans le cimetiĂšre juif et la prison, et Ă©galement Ă lâextĂ©rieur de Kolomyja, Ă Zablotow, Sniatyn, Ottynia, et Horodenka. »
DĂ©but novembre 1941, le SD recherche des juifs qui travaillaient pour les SoviĂ©tiques et qui, selon certains, se seraient « planquĂ©s » au sein de la police juive⊠Le Judenrat a un ultimatum dâune heure pour les livrer, sans quoi tous les juifs vivant dans les maisons des membres du Judenrat seraient exĂ©cutĂ©s. Les juifs se rendent et sont exĂ©cutĂ©s sur place. NĂ©anmoins, le SD dirigĂ© par le SS-HauptscharfĂŒhrer Gerhard Goede et accompagnĂ© de la police auxiliaire ukrainienne, se rend dans la rue Mokra entre dans les maisons, en extirpe les Juifs et les arrĂȘte. Ceux qui tentent de fuir sont immĂ©diatement tuĂ©s. 600 Ă 1.000 vieux, malades, femmes et enfants sont amenĂ©s dans la prison. Le lendemain, ils sont emmenĂ©s dans la forĂȘt de Szeparowice et assassinĂ©s. Un survivant du ghetto de Kolomyja, Samuel SchĂ€chter, raconte : « Chlipko de la Hilfspolizei, un ukrainien de Bukovine, dit qu'il veut montrer une exĂ©cution massive de Juifs sans balles, en expliquant quâil veut Ă©pargner au Judenrat le coĂ»t des munitions utilisĂ©es. La tombe Ă©tait en forme de quadrilatĂšre. Chlipko a ordonnĂ© aux victimes de sâallonger autour de la fosse, les corps sur le rebord et la tĂȘte dĂ©passant le bord de la fosse. Puis il sâest saisi dâun hache, et comme un fou Ă bondit de corps en corps ; Ă chaque coup de hache une tĂȘte Ă roulĂ© au fond de la fosse. Le travail terminĂ©, il Ă©tait trĂšs fatiguĂ© et Ă©claboussĂ© de sangâŠÂ » Le SS mettent fin Ă ce genre d'exĂ©cution et le reste des Juifs est exĂ©cutĂ© « de la maniĂšre traditionnelle ».
Le 23 dĂ©cembre, tous les juifs possĂ©dant un passeport Ă©tranger sont convoquĂ©s Ă la Gestapo de Kolomyja. Les 1.200 qui se prĂ©sentent sont Ă©galement conduits dans la forĂȘt de Szeparowice et tuĂ©s. Le 24 janvier 1942, 400 intellectuels juifs sont emprisonnĂ©s, torturĂ©s, et tuĂ©sâŠ
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