Le camp de concentration de Dora
2.1. Le camp tunnel
Les 17 et18 août 1943, 596 bombardiers de la RAF détruisent le site de Peenemünde où sont étudiées et construites les fameuses armes secrètes V1 et V2 (encore nommées A4). Hitler décide en août 1943 de faire construire des ateliers souterrains pour produire à la chaîne des V2. Himmler nomme alors le chef du groupe « constructions » de l’office principal d’administration économique (WVHA) de la SS, Hans Kammler, « délégué spécial à la production du A4. » Kammler se trouve donc dépendre à la fois de Himmler, du chef du WVHA, Oswald Pohl, et du ministère de l’armement d’Albert Speer. Il a plein pouvoir pour user et abuser de la main d’oeuvre concentrationnaire. Kammler confie cette mission aux dirigeants de DORA. Ceux-ci choisissent une colline, le Kohnstein, dans les montagnes du Harz, près de la ville de Nordhausen, pour y creuser une usine souterraine.
Un kommando « Dora » est formé dans le camp de Buchenwald, camp le plus proche (70km), et les 107 premiers détenus arrivent sur le site le 25 août 1943 pour commencer les travaux d’aménagement de l’usine souterraine. Un ensemble de souterrains et de galeries existait déjà depuis 1936 : en effet depuis 1917, la firme chimique BASF (Badische Anilin und Soda Fabrik) exploite à cet endroit une carrière souterraine d’anhydrite et depuis 1936 y creuse des galeries pour servir de stockage à des produits dangereux. La première de ces galeries, la galerie B, est juste terminée lorsqu’est prise la décision d’y installer des ateliers de construction de fusées. La tâche de ce Kommando, baptisé « Dora », consiste à transformer ce lieu de stockage souterrain en usine moderne pour la production des fusées à la chaîne, et à creuser un nouveau tunnel et des galeries pour créer une nouvelle unité de production. L’ensemble du chantier est placé sous le contrôle direct de la SS.
Pendant six mois, le chantier de Dora est un enfer : dans la pagaille et la violence, les détenus doivent achever le percement des galeries et transporter des machines de grande dimension, avec des moyens de levage rudimentaires. En outre, les prisonniers doivent dormir sous terre, dans des conditions d’hygiène épouvantables. L'essentiel du camp est l'usine souterraine, le « Tunnel », formé en fait de deux tunnels A et B parallèles, ayant chacun 3 kilomètres de long et reliés entre eux par une quarantaine de galeries ou « Hallen ». Le tout alimenté par un important réseau de voies ferrées. Jour et nuit, 6.000 déportés et plus de 5.000 Allemands y travaillent. Le gros de l'usine est achevé à l'automne 1944. De 6.000 en novembre 1943, l’effectif des détenus employés au « Tunnel » bondit à 12.000 en janvier 1944, quand l’usine commence à produire. La mortalité est considérable : on compte 2.882 décès en six mois (dont 800 Russes, 700 Français, 400 Polonais et 300 Italiens). Les corps sont brûlés au crématoire de Buchenwald. 3.000 autres détenus, malades, sont expédiés à Maïdanek et Bergen-Belsen pour y être éliminés.
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