Malgré la coupure de la Révolution, qui interrompt les grandes constructions, les théories restent celles du XVIIIè siècle et perpétuent les principes des Soufflot, Chalgrin, Boullée, Ledoux... Le dogme intangible de l'Antique est le même que dans le « style Louis XVI », et ce n'est ni l'Institut ni Napoléon qui s'y opposent. L'influence de l'Empereur joue en faveur du classicisme dans son goût de gloire et d'immortalité : il aime le fer et le granit, matériaux d'une solidité symbolique ; il veut des monuments grandioses et sobres, de vastes perspectives (il fait faire la façade du Palais-Bourbon, sur la Seine, pour qu'elle soit dans l'axe de la Madeleine, le « temple de la Gloire », dont il rêve et dont il choisit le projet entre deux batailles). Il écoute David, qu'il aime pour son sens de la simplicité dans l'ampleur de la vision. Peut-être a-t-il été sensible au symbolisme architectural du livre de Claude Nicolas Ledoux « l'Architecture considérée sous le rapport de l'art, des meurs et de la législation » (1804), très lu, et réédité en 1846. Important est le rôle de l'Ecole polytechnique, fondée en 1795, où Monge professe la stéréotomie, Delorme et Baltard l'architecture, et qui forme des ingénieurs créateurs de techniques nouvelles, tel Polonceau, auteur du pont du Carrousel (1834). Le « Précis des leçons données à l'Ecole polytechnique » (1802-1805), de J. N. L. Durand (1760-1834), élève de Boullée, a un grand retentissement en Allemagne et au Danemark et propose une architecture rationnelle : « La vraie beauté naît des dispositions heureuses. » L'Ecole est pour le fonctionnalisme, en opposition avec les Beaux Arts, où triomphe la doctrine de l'antique, qui conduit au pastiche : colonne Vendôme, 1806-1810, inspirée de la Trajane ; arc de triomphe du Carrousel, 1806, qui ouvre la cour d'honneur des Tuileries, imité de l'arc de Septime Sévère ; arc de triomphe de l'Étoile, 1806-1836 ; Madeleine, 1806-1842, copie assez lourde d'un temple romain ; Bourse, 1808, autre temple antique.
| Paris : le pont du Carrousel (1831-1834) par Polonceau |
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| Paris : la colonne Vendôme (1806-1810) |
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| Paris : l’arc de triomphe du Carrousel (1806) |
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| Paris : l’arc de triomphe du Carrousel (1806) |
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| Paris : l’arc de triomphe de l'Étoile (1806-1836). |
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| Paris : la Madeleine (1806-1842). La nef |
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| Paris : la Bourse (1808) ou Palais Brongniart |
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| Paris : la Bourse (1808) ou Palais Brongniart |
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Le fer, qui sera le matériau de la fin du siècle, réalise déjà en 1803 le pont des Arts, par Cessart et Delon, les combles du Salon carré, le pont suspendu sur le Rhône près de Tournon, en 1824, par l'ingénieur Marc Seguin ; en 1811 Bélanger refait en fer le toit de la Halle au blé ; mais c'est Labrouste, à la bibliothèque Sainte Geneviève (1843-1850) et Duquesney à la gare de l'Est (1847-1852) qui usent du fer, comme des autres matériaux, pour en tirer un parti esthétique autant qu'architectonique.
| Paris : le pont des Arts (1803), par Cessart et Delon |
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| Marc Seguin et ses frères : le premier pont de Tournon dit « l’ancêtre » (1825 |
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