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Les « Primitifs » italiens (Histoire de l'art)

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7.2. Artistes et Å“uvres

Le Maître de la Vierge d’Humilité
Paolo Veneziano
Lorenzo Veneziano
Catarino
Barnaba da Modena
Jacobello del Fiore
Michele Giambono

7.2.2. Paolo Veneziano

7.2.2.1. Biographie

Peintre vénitien (1300–1358/1362), Paolo Veneziano est considéré comme le véritable créateur de la peinture vénitienne durant la première moitié du trecento.

Les premières oeuvres de l'artiste sont marquées par une manière stylistique plus « continentale », où se retrouve l’influence du Giotto de Padoue, de l’école de Rimini et de l’occident roman. Ainsi les parties peintes du retable sculpté de l'église San Donato de Murano (1320 ?) et surtout le « paliotto » (devant d'autel) illustrant l'Histoire du bienheureux Leone Bembo, de 1321 (église San Biagio de Dignano) : modelé énergique, coloris vibrant, observations aiguës et essais précis de perspective sont les marques de cette oeuvre.

A partir de 1323-1324, l'art de Paolo Veneziano entre dans une phase « éclectique », un « byzantinisme romanisé » s’inspirant à la fois de l’Orient et de l’ Occident : « Couronnement de la Vierge » de la National Gallery de Washington (1324), les volets avec des Saints du « Triptyque de sainte Claire » de la Pinacothèque de Trieste (1328-1330), la « Madone aux donateurs » de l’Accademia de Venise), schématisée selon les canons byzantins, mais d'une présentation ample et monumentale et d'un rythme linéaire de goût gothique, et le « Paliotto de sainte Lucie » à l'évêché de Veglia, qui traduit un répertoire orientalisant en langage dynamique, à tendances descriptives.

Dans une étape suivante, Paolo adhère totalement à l'art néo-grec des Paléologues : ainsi la « Dormition de la Vierge », panneau central du grand polyptyque se trouvant jadis à l'église San Vincenzo de Vicence et dont des fragments sont conservés au musée de cette ville, sa première œuvre signée et datée (1333). Dans cette œuvre fondamentale, les formules byzantines n'excluent pourtant pas quelques préciosités linéaires gothiques, ni toute recherche d'expression dans les visages sévères. On retrouve ces mêmes caractéristiques dans une série de petits polyptyques portatifs auxquels il collabore : petit triptyque de la Galleria Nazionale de Parme, polyptyque partagé entre le Worcester Art Museum, la National Gallery de Washington et le Petit Palais d'Avignon, polyptyque du musée de Tbilissi... Dans la même lignée se situe la « Madone de Merate » (1340, collection particulière), « prototype » de toute une série de « Vierges à l'Enfant » qui n’en diffèrent que par de petites variantes.

A la même époque, début des années 1340, Paolo s'impose à Venise en réalisant les commandes officielles du doge Andrea Dandolo pour le Palazzo Ducale et pour la basilique San Marco :

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  • la Pala feriale (qui recouvrait les jours ouvrables la Pala d'Oro de San Marco, réservée aux solennités), datée du 22 avril 1345 est signée par Paolo et ses fils Luca et Giovanni, dénote une telle identité de moyens d'expression figurative qu'il est impossible de discerner la part de chacun des collaborateurs, même si la zone inférieure (Scènes de la vie de saint Marc), est plus « contientale » et la zone supérieure plus « byzantine »…
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  • le retable exécuté en 1346 pour le Palazzo Ducale et détruit dans l'incendie de 1483, dont il reste deux panneaux illustrant des épisodes de la vie de saint Nicolas (Florence, Pitti, donation Contini-Bonacossi) ;
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  • la Madone de l'église paroissiale de Carpinetta à Cesena (1347) est plus gothique ;
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  • le Polyptyque sur trois registres de l'église de San Giacomo à Bologne (preuve de relations du maître avec cette ville), dont quelques éléments (Saint Georges tuant le dragon) atteignent à une vraie perfection d'expression et de style gothique ;
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  • le polyptyque de Chioggia, daté de 1348 (Oratorio San Martino et panneaux de diverses provenances).

Vers 1350, Paolo voyage probablement en Grèce et à Constantinople, dont il revient avec une manière beaucoup plus byzantine : ainsile grand polyptyque de saint François et de sainte Claire (Venise, Accademia), œuvre complexe et exemplaire où le rythme byzantin de la composition, le décor d'un faste oriental se mêlent à des éléments du répertoire continental et à des accents bolonais. Ce néo-byzantinisme si original, révélateur de la grande personnalité artistique de Paolo, se retrouve dans le polyptyque de la collégiale de Pirano, la « Vierge et l'Enfant avec huit saints » (1354), où point déjà un certain académisme, dans le polyptyque du couvent de Santa Eufemia à Arbe (Ile de Rab), dans de polyptyque du Louvre, dans le polyptyque des Saints de San Severino (Pinacothèque Communale de Venise),où la « manière grecque » se rehausse d'une stylisation très raffinée, d'une préciosité gothique et d’une grâce piquante.

La carrière de Paolo s’achève sans doute avec le « Couronnement de la Vierge » de la collection Frick de New York, daté de 1358, œuvre à laquelle collabore son fils Giovanni. C’est un chef-d'œuvre authentique par la profondeur du souffle gothique, le coloris éclairci et brillant, l'équilibre admirable du style, qui réunit Orient et Occident dans une vision originale et marque une première étape glorieuse de la peinture vénitienne.

7.2.2.2. Le polyptyque de Santa Chiara

Paolo Veneziano : Polyptyque de Santa Chiara. Vers 1350. Tempera sur panneau de bois, 167 x 285 cm. Venise, Gallerie dell’Accademia
Paolo Veneziano : Polyptyque de Santa Chiara. Vers 1350. Tempera sur panneau de bois, 167 x 285 cm. Venise, Gallerie dell'Accademia

Le développement de l'art de Paolo Veneziano est caractérisé par une sorte d’« aller-retour » entre deux influences : d'une part, les progrès accomplis dans la peinture italienne contemporaine et de l'autre les traditions orientales de l'art figuratif. Dans ce polyptyque, au magnifique cadre en bois du style gothique international, chacune des nouveautés de l'art occidental tend à trouver son expression dans un cadre typique de l'art byzantin de l'époque des Paléologues. Paolo combine des éléments gothiques et byzantins en une synthèse nouvelle et convaincante. Il utilise une technique miniaturiste qui rappelle celle de la Pala d'Oro, fondée sur une observation minutieuse des détails infimes.

Le centre physique et spirituel du schéma iconographique est le « Couronnement de la Vierge », qu’entourent huit scènes de la vie du Christ. Sur la gauche, l'Adoration des Mages, le baptême du Christ, la Cène et le Christ au mont des Oliviers ; à droite la montée au Calvaire, la crucifixion, la Résurrection avec le « noli me tangere » et l'Ascension. Au registre supérieur, entre les quatre évangélistes, six scènes racontent, de gauche à droite, la Pentecôte, sainte Claire prenant le voile, saint François renonçant aux biens de ce monde et rendant ses vêtements à son père, la stigmatisation de Saint François, la mort de saint François et le Jugement dernier.

Ce contraste entre la « manière grecque » et la manière gothique se retrouve dans toute cette œuvre : ainsi le rythme de la composition ou les figures des personnages sont plus gothiques, de même que les scènes du Christ au Mont des Oliviers et la Crucifixion et la scène centrale du couronnement, alors que son plus « grecs » les scènes de l’Adoration des Mages ou du Baptème du Christ.

Paolo Veneziano : Polyptyque de Santa Chiara, panneau de gauche. Vers 1350. Tempera sur panneau de bois, 167 x 285 cm. Venise, Gallerie dell’Accademia
Paolo Veneziano : Polyptyque de Santa Chiara, panneau de gauche. Vers 1350. Tempera sur panneau de bois, 167 x 285 cm. Venise, Gallerie dell'Accademia
Paolo Veneziano : Polyptyque de Santa Chiara, panneau de droite. Vers 1350. Tempera sur panneau de bois, 167 x 285 cm. Venise, Gallerie dell’Accademia
Paolo Veneziano : Polyptyque de Santa Chiara, panneau de droite. Vers 1350. Tempera sur panneau de bois, 167 x 285 cm. Venise, Gallerie dell'Accademia
Paolo Veneziano : Polyptyque de Santa Chiara : détail : le couronnement de la Vierge. Vers 1350. Tempera sur panneau de bois, 167 x 285 cm. Venise, Gallerie dell’Accademia
Paolo Veneziano : Polyptyque de Santa Chiara : détail : le couronnement de la Vierge. Vers 1350. Tempera sur panneau de bois, 167 x 285 cm. Venise, Gallerie dell'Accademia

7.2.2.3. Le retable de Saint Marc

Paolo Veneziano : Retable de Saint Marc, vue d’ensemble. 1345. Deux panneaux de bois, 59 x 325 (chaque panneau). Venise, Basilique saint Marc
Paolo Veneziano : Retable de Saint Marc, vue d’ensemble. 1345. Deux panneaux de bois, 59 x 325 (chaque panneau). Venise, Basilique saint Marc

Cette oeuvre a été commandée à Paolo Veneziano et ses fils Giovanni et Luca par Andrea Dandolo, Doge de Venise, afin de recouvrir la Pala d'Oro durant les périodes où ele ne devait pas être exposée au public. La Pala était en effet régulièrement cachée durant de longues périodes de l’année liturgique, en particulier durant le Carême. Cette œuvre, réalisée par Paolo avec ses fils Luca et Giovanni en 1345, jouit d'un grand prestige, également à cause du lieu où elle était placée, au point qu'elle fut considérée comme l'oeuvre phare de la peinture vénitienne au XIVè siècle.

Dans le register supérieur, saint jean, saint Marc, la Vierge supportant le Christ mort, saint Jean l’Evangéliste, saint Pierre et saint Nicolas. Dans le registre inférieur, des scenes de la vie de saint Marc.

Paolo Veneziano : Retable de Saint Marc, scène de la vie de Saint Marc. 1345. Tempera sur bois, 58 x 42 cm. Venise, basilique Saint Marc
Paolo Veneziano : Retable de Saint Marc, scène de la vie de Saint Marc. 1345. Tempera sur bois, 58 x 42 cm. Venise, basilique Saint Marc

Ici, un détail représente la scène ou Saint Marc apparaît pour calmer la tempête qui risque d’engloutir le navire transportant son corps d'Alexandrie à Venise.

L'emploi des couleurs donne un sentiment immédiat d'espace et d'air marins, né du contraste entre le bleu-vert profond de la mer et l'ocre rouge des rochers. Malgré des proportions peu réalistes et la stylisation à la manière byzantine des personnages et du paysage, la sensation physique du raclement de la coque contre le roc est parfaitement évoquée. Ces détails permettent à Paolo de manifester son approche directement visuelle des formes et de l'espace. Tandis que Giotto campe des personnages avant de construire l'espace qui les entoure, Paolo imagine d'abord un espace qu'il peuple ensuite de figures. En cela, son style s'enracine dans la tradition impressionniste de la peinture antique, par-delà de l'art byzantin.

Le tableau est signé au bas « MAGR. PAULUS CU LUCA. FILIIS ET IOHE SUIS PINXERUNT (HOC OPUS)" (Peint par Maître Paul avec ses fils Luc et Jean).

Paolo Veneziano : Retable de Saint Marc, panneau de gauche. 1345. Venise, Basilique saint Marc
Paolo Veneziano : Retable de Saint Marc, panneau de gauche. 1345. Venise, Basilique saint Marc
Paolo Veneziano : Retable de Saint Marc, panneau de gauche. 1345. Venise, Basilique saint Marc
Paolo Veneziano : Retable de Saint Marc, panneau de gauche. 1345. Venise, Basilique saint Marc
Paolo Veneziano : Retable de Saint Marc, découverte des reliques de Saint Marc. 1345. Venise, basilique Saint Marc
Paolo Veneziano : Retable de Saint Marc, découverte des reliques de Saint Marc. 1345. Venise, basilique Saint Marc

7.2.2.4. Å’uvres diverses

Couronnement de la Vierge

Paolo Veneziano : Couronnement de la Vierge. 1324. Tempera sur panneau de bois, 99 x 78 cm. Washington, National Gallery of Art
Paolo Veneziano : Couronnement de la Vierge. 1324. Tempera sur panneau de bois, 99 x 78 cm. Washington, National Gallery of Art

Ce « Couronnement de la Vierge » se place au début de la carrière de Paolo Veneziano. C’est la première oeuvre signée du peintre où il révèle une connaissance des images à la fois vaste et très diversifiée. La liberté, la fraîcheur et l'éclat de la couleur incarnent le goût vénitien. Contrairement à la peinture toscane, aucune forme n’apparait clairement, l’oeuvre est un enchevêtrement de lignes et de couleurs, comme dans un tissu luxueux.

Le thème du Couronnement de la Vierge n’est pas byzantin et semble avoir pris naissance près de Paris au XIIè siècle. Ce couronnement de Paolo Venezeiano est peut-être le premier qui ait été réalisé à Venise. Ses couleurs fortes et ses figures fragiles semblent presque abstraites : même sans modèles byzantin à suivre, Paolo donne à son œuvre une forte tonalité byzantine (or des drapés).

Crucifixion

Paolo Veneziano : Crucifixion. Vers 1340. Tempera sur panneau de bois, 31,8 x 37,5 cm. Washington, National Gallery of Art
Paolo Veneziano : Crucifixion. Vers 1340. Tempera sur panneau de bois, 31,8 x 37,5 cm. Washington, National Gallery of Art

Le poète Pétrarque appelait Venise « un monde à part ». Protégé par un déconcertant réseau de canaux, la ville s’est naturellement tournée vers la mer et se constitue aux XIIIè et le XIVé siècles un vaste empire en Méditerranée orientale. Lorsque ses intérêts commerciaux sont menacés, la « Sérénissime » détourne la quatrième croisade de la Terre Sainte et l’envoie piller les richesses de Byzance. De nombreux artistes grecs sont alors forcés de trouver du travail en Italie. Aussi la ville s’ouvre à l’influence des traditions byzantines. Paolo Veneziano s’en trouve fortement influencé, bien qu’il connaisse et ait pratiqué les autres manières, notamment celles de Toscane ou de Rimini.

Ce panneau de petite taille et de forme arquée suggère qu'il pourrait avoir couronné un panneau beaucoup plus grand faisant partie d’un polyptyque.

Le doge Dandolo présenté à la Madone

Paolo Veneziano : Le Doge Francesco Dandolo et son épouse présentés à la Madone. 1339. Panneau de bois. Venise, Santa Maria Gloriosa dei Frari
Paolo Veneziano : Le Doge Francesco Dandolo et son épouse présentés à la Madone. 1339. Panneau de bois. Venise, Santa Maria Gloriosa dei Frari
Paolo Veneziano : Le Doge Francesco Dandolo et son épouse présentés à la Madone, détail. 1339. Panneau de bois. Venise, Santa Maria Gloriosa dei Frari
Paolo Veneziano : Le Doge Francesco Dandolo et son épouse présentés à la Madone, détail. 1339. Panneau de bois. Venise, Santa Maria Gloriosa dei Frari

Le doge et son épouse sont présentés à la Vierge et à l'Enfant par saint François et sainte Elisabeth de Hongrie. La peinture est encore byzantine dans la rigidité des personnages ; cependant, elle témoigne d'une certaine évolution vers le nouveau style gothique.

Madone et enfant

Paolo Veneziano : Madone et enfant avec deux donateurs. Vers 1325. Tempera sur panneau de bois, 142 x 90 cm. Venise, Gallerie dell’Accademia
Paolo Veneziano : Madone et enfant avec deux donateurs. Vers 1325. Tempera sur panneau de bois, 142 x 90 cm. Venise, Gallerie dell'Accademia

Paolo Veneziano, le premier grand artiste identifiable dans l'histoire de la peinture vénitienne, est manifestement familier des traditions byzantines. Mais, tout en revenant au monde anachronique de l'art byzantin afin d’y trouver un moyen d'expression pour son art, il est parfaitement au courant des grands progrès réalisés dans l'art occidental, en particulier par les maîtres toscans Giovanni Pisano et Giotto dont il a sans doute admiré les travaux à la Chapelle des Scrovegni à Padoue.

Cette Madone avec deux donateurs est un bon exemple de la « manière » de Paolo, mêlant l’hiératisme byzantin aux traditions occidentales. La Vierge est assise sur le trône dans une attitude rigide et porte l'enfant à l'adoration des donateurs. L'enfant est entouré d'une mandorle bleue, conformément à un schéma iconographique syrien. Mais la vivacité du dessin et la représentation des figures humaines révèle les apports de la toute nouvelle manière occidentale. Ainsi, l'artiste rassemble dans cette œuvre les composantes formelles de l’ouest et les schémas de composition byzantins dans une vision personnelle.



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