Art roman : l’aspect technique : l’équilibre roman
2. La solution romane : une recherche d’équilibre
Solutions principales
Solutions annexes et types d’églises
Les procédés trouvés par les constructeurs romans pour solutionner le problème des poussées de la voûte tendent tous à transformer les forces obliques en charges, à ramener une force d'écartement à une simple pesanteur. Les solutions, utilisées toutes ensembles, consistent essentiellement en solutions de base et en solutions annexes.Â
2.1. Solutions principales
2.1.1. Absorber les forces d’écartement
On absorbe les forces d'écartement en construisant des murs plus épais et moins hauts (A Saulieu, en Côte d'Or, l'écartement varie de 5m33 à 6m33 entre deux travées !). Cet épaississement du mur (1m à Issoire et 1m90 à Aulnay de Saintonge) s'accompagne en même temps d'une diminution de la taille des baies : c'est l'une des constantes de l'architecture romane qui pose immédiatement le problème de l’éclairage de l’église romane : la lumière arrive dans la nef le plus souvent de manière indirecte, à travers les bas-côtés ou les tribunes. Comme la plupart des églises ont des bas-côtés, on perce donc dans les murs de la nef des grandes arcades en arcs appareillés. Pour que ces arcades soient plus solides, on les double par le dessous avec un deuxième arc plus étroit : c'est l’arcade à double rouleau.
 | Saulieu (Cote d’Or), saint Andoche : élévation de la nef |
|
 | Issoire (Puy du Dôme), saint Austremoine : élévation de la nef. Eclairage indirect |
|
2.1.2. Epauler l’édifice
On épaule l'édifice par des contreforts construits à l’extérieur : le contrefort permet, de point en point, de contenir par son épaisseur l'écartement des murs. Un contrefort n'est pas un organe de contrebutement, mais d’épaulement, situé le plus souvent à hauteur des retombées des voûtes d'arêtes.
 | Les bandes lombardes et lésènes sont fréquentes dans l’architecture romane rhénane, notamment en Alsace |
|
 | Contrefort roman |
|
Le contrefort est beaucoup plus efficace que les bandes lombardes du premier âge roman, qui tirent leur nom des maçons de Lombardie. Elles sont plus décoratives qu’architectoniques, car, trop peu profondes pour épauler, elles servent juste à raidir le mur.
 | Allonnes en Poitou (Deux Sèvres) : l’église saint Pierre, du XIIè, de style poitevin, avec ses massifs contreforts |
|
 | La Garde Adhémar (Drôme) : église saint Michel. Vue générale. Remarquer les puissants contreforts |
|
 | Sancaprasio en Aragon. L’église et se magnifiques bandes lombardes. 1020-1030 |
|
 | Sancaprasio en Aragon. L’église et se magnifiques bandes lombardes. 1020-1030 |
|
2.1.3. Contrebuter
Le contrebutement, contrairement au contrefort exerce une force active qui va dans le sens opposé à la force exercée par la voûte : c’est le principe des collatéraux ou des bas-côtés qui « contrebutent » la nef centrale. Ainsi, le demi berceau sur tribune s'appuie sur la base de la voûte du vaisseau central et engendre une poussée qui dévie la force oblique. Cette technique est la raison d'être des tribunes d'une église romane.
 | Système de contrebutement de la nef centrale par un demi-berceau sur tribunes |
|
Le principe du collatéral contrebutant la nef centrale est aussi appliqué au chevet où le déambulatoire sur voûte d’arêtes et les absidioles contrebutent le chevet : Saint Nectaire et les grandes églises d’Auvergne offrent les plus beaux exemples de ce système.
 | Saint Nectaire (Puy du Dôme) : vue générale de la nef vers le narthex et élévation de la nef |
|
2.1.4. Concentrer les forces en des points précis
La voûte d'arêtes, très utilisée dans le voûtement des collatéraux (rarement dans celui du vaisseau central) concentre les forces sur des supports précis, eux-mêmes épaulés à l’extérieur de l’édifice par les contreforts, en même temps qu’elles servent de raidisseurs aux supports du vaisseau central.
 | Architecture romane : voûte d’arêtes sur bas coté |
|
2.1.5. Accroître la charge
Le poids du mur de la nef centrale, mais aussi des voûtes, charpentes et toitures absorbe les forces obliques de la voûte du collatéral et les transforme en simples charges.
2.1.6. Supporter
Ce rôle de support est confié à l’arc doubleau : à l'intérieur, les constructeurs soutiennent le berceau par le dessous, à intervalles réguliers, à l'aide d'arcs saillants appliqués sous la voûte et nommés arcs doubleaux. Ces arcs reposent sur des pilastres engagés ou des demi-colonnes engagées dans les murs et nommés dosserets.
Les arcs doubleaux ont un rôle fondamental : ils supportent la voûte de point en point et sont le plus souvent doublés à l'extérieur par des contreforts.
 | Architecture romane : vaisseau couvert d’une voûte en plein cintre avec arcs doubleaux et avec bas côté surmontés d’une tribune couverte d’un demi berceau |
|
2.1.7. Charger sur le rein
Charger sur le rein, c'est créer un poids supplémentaire qui, appuyant sur les retombées de la voûte engendre une force oblique qui dévie à son tour la fore oblique de la voûte et rééquilibre ainsi l'ensemble.
Ainsi, la nef romane est transformée en une structure d'absorption et de déviation des forces. Elle est constituée, de travée en travée, d'un ensemble de forces en lutte les unes contre les autres. Les diverses possibilités d’épaulement et de contrebutement employées par les constructeurs vont déterminer la variété des églises romanes.
 | Architecture romane : système de poussées, de contre poussées et de contrebutement |
|

Articles connexes