Sobibor
3.1. Phase I
Le chantier démarre en mars 1942 sur un rythme accéléré et s’achève mi avril. Les travaux sont supervisés par le Hauptsturmführer Thomalla, aidé par un professionnel, le Baurat (conseiller) Moser. Les travaux sont exécutés par des entrepreneurs privés locaux utilisant des ouvriers juifs raflés dans les villages avoisinants. Une ligne de chemin de fer à voie étroite relie la gare de Sobibor au camp, où elle aboutit à un quai de 400 mètres de long. Elle était utilisée jadis pour l'exploitation forestière. Elle va servir au transport des déportés. Le camp est entouré d'un réseau de barbelés, d'un fossé rempli d'eau et d'un champ de mines. Des branchages entrelacés dans les barbelés empêchent de voir ce qui se passe à l'intérieur. Des miradors armés de mitrailleuses surveillent l'ensemble.
Mi avril, Christian Wirth arrive au camp pour les premiers essais de gazage. Les « essais » sont effectués sur 150 juifs déportés de Wlodawa puis sur 250 juifs, essentiellement des femmes venant du camp de travail de Krychow : il sont tués devant le contingent SS au grand complet. Wirth sera nommé début d'août 1942, inspecteur des trois camps de l'opération Reinhard…
Les essais étant concluants, on engage la phase « industrielle » : le 28 avril Globocnik désigne Franz Stangl, un officier SS ayant pris part à l'opération d'euthanasie T4, commandant du camp de Sobibor. Stangl commande 20 à 30 soldats SS qui pour la plupart ont fait leurs armes au cours de l'opération T4. De vrais professionnels… L'équipe de SS est complétée par une compagnie de gardes ukrainiens, les fameux « Trawnikis » en uniforme noir.
De mai à juillet 1942, au cours de cette première phase, plus de 100.000 juifs sont gazés à Sobibor. Ils proviennent pour l’essentiel du district de Lublin :
- le premier gros convoi de Lublin arrive le 7 mai ;
- du 3 au 12 mai, 21.600 juifs de Pulawy ;
- du 13 au 15 mai, 11.300 juifs de Krasnytsaw ;
- du 16 au 18 mai 7.200 juifs du district de Zamosc ;
- du 20 au 30 mai, 6.130 juifs de Chlem ;
- du 1 au 15 juin, 11.300 juifs de Hrubieszow, 3.000 de Biala-Podlaska, 800 de Krasniczyn et Krasnystaw...
Soit un total de 61.330 êtres humains gazés…
Mais durant la même période arrivent aussi 10.000 juifs d’Autriche, 6.000 du Protektorat ainsi qu’une partie des 24.378 juifs slovaques qui seront assassinés à Sobibor avant la fin de l’année, la plupart ayant transité par le « camp modèle » de Theresienstadt… Le premier convoi venant d’Autriche, le « Da 38 », part de Vienne, 14 juin 1942 vers midi ; il transporte 1.000 juifs. 949 arrivent vivants à Sobibor le 17 juin à 9h15 ; moins de trois heures plus tard, ils ne sont plus.
SS et policiers escomptent déporter sur Sobibor plusieurs centaines de milliers de Juifs. Mais fin juillet la voie de chemin de fer venant de l’ouest et menant à Sobibor cède. Il faut la réparer. Les convois sont donc interrompus, saufs quelques-uns, rares, venant de l’est.
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