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Alsace, le temps du Reich : 1870-1918

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6.4. Les mutations religieuses

Le régime allemand maintient les structures religieuses en place, mais on voit apparaître un clivage national à l'intérieur de chaque confession. Chacune d'entre elles a tendance à s'appuyer sur la région pour mieux affirmer son identité, mais a perdu avec le départ des optants une partie de ses forces vives qu'elle ne retrouve que très partiellement avec l'arrivée de coreligionnaires allemands.

Le Kulturkampf (1872-1874) entraîne la fermeture temporaire des établissements scolaires catholiques et l'expulsion des jésuites en 1872. Durant plusieurs décennies, le clergé demeure attaché à la France et de nombreuses familles catholiques envoient leurs enfants en France pour qu'ils y acquièrent une formation et une culture françaises. Mais après 1890, avec la création d'une faculté de théologie catholique en 1902 et la politique anticléricale française de 1905, la jeune génération tend à se conformer au moule allemand, qui épargne à l'Alsace les lois françaises sur la séparation de l'Église et de l'État et une nouvelle confiscation des biens d'Église.

Les protestants connaissent un clivage complexe : les réformés, mus en partie par les industriels mulhousiens, et les libéraux, largement représentés par la bourgeoisie économique, demeurent résolument francophiles. Les deux figures emblématiques sont l'historien Rodolphe Reuss, qui quitte en 1896 l'Alsace pour éviter à ses fils le service militaire allemand, et Charles Gérold, pasteur à Saint-Nicolas et porte-parole de la cause française.

Face au régime allemand, l'intégration progresse indéniablement dans le corps social protestant, en particulier dans les paroisses rurales luthériennes et les milieux populaires, dont bien des membres s'élèvent socialement. Il est vrai que le régime favorise les protestants, surreprésentés parmi les fonctionnaires, les étudiants et les élèves de l'enseignement secondaire. Mais une attitude malthusienne entraîne une baisse de la natalité chez les protestants, qui voient leur poids démographique diminuer face aux catholiques dans les communes mixtes.

À l'inverse, le clergé catholique a le souci de créer une force politique pour résister à l'État à dominante protestante. Il crée le parti du Centre, solidement structuré, qui bénéficie d'une multitude d'associations fondées entre 1880 et 1914. Le clergé peut ainsi à la fois encadrer les fidèles et former des cadres politiques, syndicaux et associatifs. Il s'intéresse également aux caisses Raiffeisen dont il s'efforce de prendre le contrôle : en 1896, 55 prêtres président des conseils de surveillance, ce qui incite les protestants à fonder des caisses concurrentes, celles du « Revisionsverband ».

Sous l'influence de la sécularisation, le recrutement sacerdotal et pastoral tend à se tasser, à la différence des congrégations. En 1914, l'on recense 25 congrégations féminines et 12 masculines, 4 772 religieuses et 463 religieux. On note en outre un remarquable essor missionnaire, mais uniquement du côté catholique. Si la vitalité religieuse demeure forte en milieu catholique, notamment à travers les confréries, les pèlerinages et l'imagerie religieuse, en milieu protestant urbain en revanche les liens avec les paroisses tendent à se relâcher.

Face aux mutations sociales, les deux Églises s'ouvrent nettement aux questions sociales. Les protestants privilégient l'engagement caritatif : création d'hôpitaux, du collège du Bon Pasteur, lutte contre l'alcoolisme et la prostitution, réinsertion sociale. Du côté catholique, l'abbé Cetty initie le catholicisme social, favorable à une intervention législative de l'État pour protéger l'ouvrier dans son travail. Le clergé multiplie les initiatives et contribue au développement d'un puissant syndicalisme chrétien sous l'impulsion des abbés Haegy et Cetty.

La musique religieuse connaît un véritable apogée. Ernest Munch fonde le choeur de Saint Guillaume qui réhabilite les oeuvres de Bach, des cantates et surtout une Passion chaque Vendredi saint. Le jeune Albert Schweitzer s'impose comme un talentueux organiste de Bach. Les chorales d'église se multiplient grâce à Friedrich Spitta, qui publie un remarquable recueil de cantiques. Le mouvement de construction se poursuit avec l'édification de près de 150 églises catholiques, surtout en néo-roman et néo-gothique, et 72 églises protestantes, surtout en néo-gothique.

Mais les rapports confessionnels continuent à être vécus en termes de pouvoir. Les lueurs oecuméniques demeurent dans ce contexte encore rares et ponctuelles, bien que l'on voit apparaître, dans certaines communes mixtes, des cérémonies festives partagées.

La communauté judaïque a été sensiblement renouvelée. Plus du quart de ses membres ont quitté l'Alsace en 1872. Ils sont remplacés par des juifs allemands, composés surtout de négociants, membres de professions libérales et universitaires qui renforcent ainsi la bourgeoisie urbaine, alors que les communautés rurales se réduisent peu à peu.


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