L’impressionnisme (Histoire de l’art)
2. Qu’est-ce que l’impressionnisme?
Une constante de l’art et un phénomène d’époque
Une philosophie du changement
La lumière impressionniste
L’apport de la science
L’œil impressionniste
Le renouvellement de la vision
2.5. L’œil impressionniste
L’impressionnisme s'oppose totalement aux conceptions qui en font une tentative de définition, d'organisation et de restructuration du monde par l'intellect. En cela, l'impressionnisme, diverge totalement du classicisme. Il est un art éminemment matérialiste, conforme en cela à son époque de scientisme et d'évolutionnisme. Tout dans l’impressionnisme aboutit à l'œil. « L'œil, une main », disait souvent Manet, selon ce que rapporte Mallarmé. Cette formule résume exactement la promptitude de ce que fut, pour les impressionnistes, le trajet de la perception au geste pictural.
Edouard Manet : portrait de Stéphane Mallarmé. 1876. Huile sur toile. Paris, Musée d'Orsay |
Certes, cette perception se complète de sensation et de tous les effets d'ordre émotionnel que comporte le terme impression. Si le point de départ de l'opération est strictement physiologique, il aboutit à produire dans la conscience du spectateur un effet de caractère affectif.
Alfred Sisley : Le brouillard à Voisins. 1874. Huile sur toile, 65 cm x 51 cm. Paris, Musée d’Orsay |
Ainsi à la lumière de l’atelier se substitue la lumière de la nature ; les ombres, les lueurs blafardes, les contre-jours bitumeux, tous les éclairages d'école s'abolissent, le regard du peintre comme celui du spectateur entrent dans le paradis de la peinture claire. L'invention du tube de couleur qui, dès avant le milieu du XIXè siècle, permet à l'artiste de sortir de son atelier sans avoir à traîner un encombrant équipement, n’est pas pour rien dans cette révolution. Corot, un des prédécesseurs de l’impressionniste est l’un des premiers à sortir de son atelier, perpétuel promeneur, qui, dans toutes les villes, toutes les campagnes, découvre un coin capable de produire une impression sur le spectateur, impression que, dans certains titres de ses tableaux, il appellera « souvenir ».
Camille Corot : Maisons près d'Orléans. Vers 1830. Huile sur papier collé sur carton. Los Angeles, Paul Getty Museum |
Pour les impressionnistes, une région a particulièrement leurs faveurs : l'Île-de-France, la vallée de la Seine jusqu’aux côtes normandes, région humide, à la lumière mouillée et sans cesse changeante. Argenteuil et ses bords de Seine sont un des hauts lieux de l'impressionnisme à ses débuts, avec les séjours qu'y font, travaillant en commun, Manet, Monet et Renoir. Non loin, autre haut lieu, Pontoise. L'Angleterre n’est pas en reste avec ses lumières et ses brouillards que traduisaient déjà un Bonington, un Constable et surtout un Turner, objectivement grand annonciateur de l'impressionnisme.
Joseph Mallord William Turner (1775-1851)Â : L'incendie du Parlement de Londres, 16 octobre 1834. Philadelphia Museum of Art |