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Le régime de Vichy

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4. Le régime et les Juifs

Les Juifs en France à la veille de la guerre
Les premières mesures contre les Juifs : 1940-1941
1942-1943 : la déportation
La chasse aux survivants : 1943-1944
Le pillage des biens des Juifs

4.3. 1942-1943 : la déportation

4.3.1. La mise en route

Hitler prend sa décision génocidaire autour de septembre – octobre 1941. Dès avant la conférence de Wannsee, qui aurait d’ailleurs du se tenir fin 1941 mais a été ajournée à cause de menaces de bombardements alliés sur Berlin, les états majors de la Gestapo des pays occidentaux dressent les premiers plans de déportation des Juifs. A Paris ; Kurt Lischka se met à l’œuvre pour activer la déportation. Mais en janvier, il se plaint auprès de sa hiérarchie car le calendrier des déportations prend du retard pour des raisons matérielles de transport. Pour lui, la déportation est une nécessité urgente, sans quoi les autorités françaises verraient dans ce retard une faiblesse de la part des Allemands...

Mais le tournant essentiel se situe au printemps 1942, après la conférence de Wannsee où est décidée la mise en oeuvre de la « Solution finale ». C’est naturellement Dannecker qui est chargé de l'exécution en France (et en Belgique). Il est aidé par les services de la Gestapo dirigés par Knochen, son adjoint Lischka et par l’ensemble de l’appareil répressif allemand, confié en avril à un commandant supérieur des SS et de la Gestapo, le SS Brigadeführer Oberg et son adjoint le SS Sturmbannführer Hagen.

Le 27 mars, le premier convoi de Juifs quitte le camp de Compiègne pour rejoindre Auschwitz : il transporte 1112 déportés, dont seuls 19 survivront en 1945. En même temps, les Allemands insistent auprès de Vichy pour obtenir des « livraisons » des internés de la zone sud et de nouvelles arrestations. Pour parvenir à ses fins, Dannecker profite de l’affaiblissement de Vichy au moment où les Allemands exigent et obtiennent le remplacement de Darlan par Laval le 16 avril 1942. Dès le 19 il exige et obtient la destitution de Vallat, le Commissaire aux questions juives, jugé anti-allemand et peu maniable. Le 6 mai il obtient son remplacement par un antisémite totalement acquis à la Collaboration, Darquier de Pellepoix qui se fend immédiatement d’une déclaration tonitruante : « Les Français doivent se rendre compte que le principal responsable de leurs misères actuelles est le juif. »

Le 5 mai 1942, Heydrich arrive à Paris. Il y reçoit Bousquet, le préfet de Police, et lui annonce qu’il y a assez de trains pour assurer les déportations des Juifs apatrides du camp de Drancy. Bousquet demande à Heydrich s’il peut s’occuper aussi des Juifs apatrides internés dans les camps de la zone Sud. Heydrich répond que tout dépend des transports.

4.3.2. Le port de l’étoile jaune

A partir de ce mois de mai, les choses s’accélèrent : le 1er juin 1942, un décret du Commandement militaire impose en zone nord le port de l’étoile de David en tissu jaune portant l’inscription « Juif » « dès l’âge de six ans révolus » pour tous les Juifs « de plus de 6 ans et de nationalité allemande, polonaise, hollandaise, belge, française, croate, slovaque et roumaine ». Cette mesure touche quelque 100.000 Juifs dans la région parisienne, mais, malgré les efforts de Darquier de Pellepoix, le maréchal Pétain refuse de l’appliquer en zone sud. Elle y sera remplacée après l’opération « Anton » du 11 novembre 1942 par l’apposition du mot « Juif » sur les cartes d’identité et d’alimentation...

Au premier jour d’application de la mesure le 7 juin, quelques Parisiens, des jeunes surtout, témoignent de leur solidarité active en arborant dans la rue des étoiles portant des inscriptions telles que « Swing », « Auvergnat », « Papou », ou même l’insigne « Juif ». Pour ce témoignage de solidarité, une vingtaine d’entre eux sera arrêtée et emprisonnée durant trois mois, à Drancy pour les hommes et à la caserne des Tourelles pour les femmes.

Les Allemands constatent très vite que l’état d’esprit général est plutôt celui d’une certaine compassion en faveur des Juifs. Il règne une grande indignation unanime au sujet des étoiles juives. Cette mesure est aussi condamnée par des antisémites, particulièrement parce qu’elle touche également les enfants obligés de porter l’étoile. En fait, l’étoile jaune entraîne la première désapprobation populaire perceptible à l’encontre des mesures antijuives, et a sorti les Français de leur apathie dans ce domaine, préparant les gestes de solidarité dont ils feront preuve quand la liberté et la vie des familles juives seront en jeu.

Conséquence immédiate du port de l’étoile jaune : la 9ème ordonnance allemande, le 8 juillet 1942 : elle empêche les Juifs devenus maintenant aisément repérables de se mêler à la vie des Français non Juifs. Les arrestations massives de Juifs peuvent ainsi débuter… débutent une semaine plus tard. Chargée de veiller au port réglementaire de l’étoile jaune, la police française arrête dans les mois qui suivent des centaines de Juifs en infraction qui seront conduits à Drancy et déportés.

4.3.3. Les tractations Berlin - Vichy

Le 11 juin, au cours d’une nouvelle réunion à Berlin, Eichmann et Dannecker décident que la France livrera 100.000 Juifs, hommes et femmes âgés de 16 à 40 ans, et paiera 700 Reichsmarcks par personne pour frais de transport. Le premier train partirait le 13 juillet... Les négociations débutent immédiatement avec les Français, tantôt avec Laval, tantôt avec le secrétaire général à la Police Bousquet, tantôt avec Darquier. Elles durent près d’un mois. Laval, à son habitude, marchande. Pour sauver les Français, il accepte de livrer les apatrides et certains étrangers.

Mais entre temps se pose un grave problème logistique. Bien qu’un second convoi soit parti de Drancy vers Auschwitz avec 1.000 déportés, le 5 juin, les Allemands réquisitionnent les Allemands ramènent presque tout le matériel de transport dans le Reich pour préparer leur offensive de printemps à l’Est, alors que le matériel restant est mis à disposition du Gauleiter Sauckel pour l’acheminement des 350.000 français (prévus) du STO dans le Reich. Ce n’est que le 19 juin que la « Hauptverkehrsdirektion » (Direction civile des transports allemands) donne le feu vert pour trois convois de 3.004 juifs partant de Drancy, Pithiviers et Beaune la Rolande. Les convois partent respectivement les 22, 25 et 28 juin.

Le 23 juin, Leibbrand, chef des opérations de la Reichsbahn donne ses directives concernant la déportation de 90.000 Juifs de France, Hollande et Belgique. Il fixe le quota français à 40.000 Juifs : 35.000 de Paris, 2.000 de Bordeaux, 1.000 de Nancy, 1.000 de Rouen et 1.000 de Dijon. Trois jours plus tard, Dannecker précise ses consignes pour la déportation des Juifs de France : Juifs français aussi bien qu’apatrides, âgés de 15 à 45 ans, et en spécifie les modalités pratiques (objets à emporter, mesures d’hygiène, gardes des trains par la Feldgendarmerie...). Les SS planifient dans le détail le calendrier de la déportation : on devrait démarrer dans les villes de province pour fondre progressivement sur Paris. Le gros problème que pose l’opération est celui de l’insuffisance des effectifs Allemands. La Police d’ordre Allemande ne dispose en France que de 3.000 hommes. Il faut donc s’assurer de la collaboration des 47.000 hommes de la police Française en zone occupée.

On négocie donc avec Bousquet la participation active de la police française. Le 4 juillet, Bousquet, au nom de Laval, assure que la police française arrêtera les Juifs dans les deux zones, occupée et non occupée. Il obtient en contrepartie que les rafles ne concernent que les Juifs étrangers.

Nouvelle réunion le 6 juillet entre le BdS Knochen, Oberg, Dannecker et Laval ; Knochen informe Laval de la décision imminent des Allemands de déporter tous les Juifs, français et autres, habitant le territoire de la zone occupée. Oberg propose que si la police française collabore, ne seraient arrêtés que les Juifs apatrides. Laval approuve. Mieux : pour arriver au quota exigé, il propose de livrer les juifs « apatrides » et leurs enfants en zone libre, ainsi que les enfants des juifs apatrides en zone occupée. La question des enfants ne l’« intéressait pas ». Dannecker, qui n’avait pas demandé la livraison des enfants, en réfère à Eichmann qui s’empresse d’accepter.

4.3.4. « Vent printanier »

Reste à peaufiner les détails techniques. Le 15 juillet a lieu une réunion technique pour la mise au point de la rafle de Paris. Y participent Dannecker, Darquier de Pellepoix, commissaire aux questions juives, Leguay, adjoint du chef de la police en zone occupée, François, directeur des camps de transit, Hennequin, directeur de la Police municipale de Paris, Tulard, directeur du fichier Juif de la préfecture de Paris, Garier, représentant le préfet du Département de la Seine, Schweblin, directeur de la Police anti-juive, Gallien, chef de cabinet de Darquier de Pellepoix, Guidot, officier d’Etat Major de la police municipale.

Le 16 juillet à l’aube, à Paris est déclanchée l’opération « Vent printanier » : en deux jours, 900 équipes de la Police Française arrêtent 12.884 Juifs « apatrides » à Paris : 3.031 hommes, 5.802 femmes et 4.051 enfants (de 2 à 15 ans). 6.000 personnes (Hommes et femmes célibataires et couples sans enfants) sont envoyés directement à Drancy.

Les autres sont parqués au Vélodrome d’Hiver « Vel’d’Hiv » ou règne une situation chaotique... beaucoup d’enfants seuls, une situation hygiénique déplorable, 50 juifs agonisent dans un coin du stade... Ils y resteront 4 jours avant d’être transférés, à partir du 20 juillet vers les camps de Pithiviers et de Beaune-la-Rolande.

Les convois commencent immédiatement à quitter la France après que Leguay ait fait trier les déportés... (19, 21, 24 et 26 juillet pour les enfants) : « Pitchipoi », tel était le nom sous lequel on désignait à Drancy le pays mystérieux vers lequel partaient les convois...

4.3.5. En zone « libre »

Le régime Pétain n’est pas en reste en zone libre : dès le 27 juillet 1942 police nationale de la zone Libre confirme à Lambert, le président de l’UGIF la décision de Vichy de livrer aux Allemands 10.000 juifs étrangers résidant en zone libre depuis le 1 janvier1936. Mais Lambert ne réagit pas…

On s’occupe d’abord des juifs internés dans les camps : A partir du 2 août, les internés juifs et tziganes des camps du Midi sont entassés dans des wagons à bestiaux et dirigés vers Drancy pour être livrés aux Allemands. Puis c’est le tour des Juifs non internés : le 5 août Vichy ordonne aux préfets de la Zone libre de « regrouper » les Juifs étrangers se trouvant dans les camps, dans les groupements de travailleurs étrangers ou dans d’autres institutions. L’ordre prévoit 11 catégories d’exemption, dont les enfants de moins de 18 ans sans parents... L’UGIF réussit à extraire plus de 1.500 enfants des divers camps.

A partir de la seconde quinzaine d’août, les rafles gagnent la zone sud : le 15 août, 4.000 Juifs apatrides sont arrêtés par la police française et livrés aux Allemands. Les 26 et 27août, c’est le tour des juifs de la zone de Lyon et de Marseille. Fin août, ce sont quelques 9.000 juifs de la zone sud qui auront été arrêtés et expédiées dans les camps des environs de Paris pour y former les convois à destination d’Auschwitz…

Mais les experts du RSHA font remarquer que la France se laisse distancer... en matière de « Solution finale » par les autres pays. Et donc après chaque convoi parti de Drancy, les nazis réclament de nouvelles victimes. Les rafles continuent donc, plus discrètes et par nationalités. Les plus visés sont d’abord les apatrides, les Allemands, les Autrichiens, les Tchèques, les Polonais et les Russes. En août - septembre, c’est le tour des Roumains, Bulgares, Yougoslaves, Néerlandais, Belges, Luxembourgeois, et en novembre des Grecs… Du moins en principe, car en réalité on arrête un peu tout le monde, y compris des Juifs français. Vichy et sa police tentent en effet de faire de la résistance quant au sort des Juifs nationaux, sacrifiant d’abord les Juifs étrangers et apatrides… Quant aux enfants, les Allemands ne réclamaient que les Juifs de plus de 16 ans. Mais le gouvernement de Vichy, en fait, Laval, sous prétexte de ne pas séparer les familles, livre également les enfants. En 1942 partent de France pour Auschwitz : 1.032 enfants de moins de 6 ans, 2.557 de 6 à 12 ans et 2.664 de 13 à 17 ans. Au total environ onze mille enfants sont déportés de France et bien peu reviendront.

4.3.6. Les réactions des Français

Il est assez difficile de savoir comment les Français ont réagi à cette politique, car la presse n’est pas libre. Les journaux ne peuvent qu’approuver ou se taire. Au début, elles vont de l’acquiescement sans réserve à la désapprobation et à la résistance active en passant par toute une gamme d’attitudes intermédiaires, dont la plus répandue est le silence embarrassé. Au début, durant la période d’adhésion fervente au Maréchal, les réactions sont très favorables : ainsi dans son allocution pascale d’avril 1941, l'évêque de Grenoble, Mgr Caillot, félicite « l’homme providentiel » (Pétain) d’avoir frappé les francs-maçons et « cette autre puissance non moins néfaste des métèques, dont les Juifs offrent le spécimen le plus marqué » !

Mais la multiplication des rafles à Paris puis en zone sud provoque dans tout le pays une très vive émotion, du moins chez ceux qui sont témoins des arrestations ou qui sont au courant, malgré une censure très rigoureuse. Le 30 août 1942 Monseigneur Saliège, archevêque de Toulouse, proteste vivement contre les arrestations de Juifs, suivi par le primat des Gaules, monseigneur Gerlier (ce qui n’empêchera pas ce dernier le 5 octobre 1942, de parler en termes très élogieux du Maréchal : « A l'une des heures les plus tragiques de notre histoire, la Providence a donné à la France un chef autour duquel nous sommes fiers de nous grouper. »), par le pasteur Marc Boegner, et même par le président Edouard Herriot… Même si l’opinion ne réalise pas encore que les déportés sont voués à l’extermination jusqu’au dernier, la désapprobation, immédiate chez les plus lucides, se généralisée en 1942. La résistance politique et militaire ne se développera vraiment qu’en 1943, après Stalingrad et après le STO et restera toujours minoritaire. Quelques Français commencent à aider les Juifs. Ils ne sont pas très nombreux, surtout au début. Puis de plus en plus de Juifs, et parmi eux beaucoup d'enfants, sont cachés, notamment par des communautés protestantes, et quelquefois catholiques (qui en « récupèrent » certains pour leur église).

De leur côté les Etats Unis et la Suisse protestent officiellement auprès du gouvernement de Vichy, ce qui n’empêche d’ailleurs pas la Confédération Helvétique de fermer ses frontières…

4.3.7. La réaction des déportés

Les Juifs eux-mêmes sont pris au dépourvu. Certains protestent auprès du gouvernement, mais beaucoup ne pas réalisent pas pleinement la gravité du danger et continuent à faire confiance au Maréchal pour les défendre, surtout parmi les Français de vieille souche, ce qui montre bien combien Vichy fait illusion. Une petite partie d’entre eux, environ 10 %, comprend qu'il vaut mieux se faire oublier et ne pas se déclarer au recensement. D’autres, quelques centaines de Juifs apatrides de la zone libre se dispersent en direction de l’Espagne, Suisse ou Italie en payant parfois très cher des passeurs : la zone d’occupation italienne sera en effet épargnée jusqu'en 1943, les forces fascistes n'étant pas préoccupées d'actions antisémites.

Mais la plupart des dirigeants acceptent de se fondre dans le cadre de l’UGIF, pour pouvoir continuer à aider leurs coreligionnaires par des moyens autorisés.

A quelques rares exceptions près, les Juifs croient qu’on les emmène dans des camps de travail en Pologne (« à Pitchipoï », disait-on à Drancy). La rumeur de la destruction ne commence à se répandre qu’après les grandes rafles de l’été. Beaucoup refusent d’ailleurs d’y croire… et c’est en effet difficile à croire.

Seuls les plus lucides et une poignée de jeunes commencent à sa cacher et à entrer en contact avec les premiers résistants.

A la fin de l’année 1942, au moment ou Hitler décide d’envahir la zone libre suite au débarquement anglo américain en Afrique du Nord, 41.911 juifs ont été déportés de France. Aux yeux des Allemands, la France reste à la traîne. Pour eux tout achoppe sur le peu d’empressement des autorités de Vichy à coopérer à la déportation des Juifs de nationalité Française. Totalement maîtres désormais de la situation, ils comptent bien remédier à cette carence…



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