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Le régime de Vichy

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4. Le régime et les Juifs

Les Juifs en France à la veille de la guerre
Les premières mesures contre les Juifs : 1940-1941
1942-1943 : la déportation
La chasse aux survivants : 1943-1944
Le pillage des biens des Juifs

4.1. Les Juifs en France à la veille de la guerre

Entre les deux guerres, le nombre de Juifs a plus que doublé, presque triplé en France. Il n’y a pas de statistiques officielles car la France ne compte pas les Juifs à part. Mais il y a de bonnes estimations : en 1914 les Juifs sont environ 120.000 Juifs en France, dont près de 40.000 étrangers venus de l’Est par vagues successives depuis le réveil de l’antisémitisme et la reprise des pogroms en Europe Centrale et Orientale vers 1881. Il y a en outre 30.000 Juifs en Alsace-Lorraine et 70.000 en Algérie.

Après la victoire de 1918 qui permet la réintégration des Alsaciens - Lorrains, l’immigration juive reprend avec la multiplication des crises et l’aggravation de l’antisémitisme dans toute l’Europe Centrale et Orientale. Les immigrants arrivent plus nombreux en France, car jusqu’à la grande récession de 1931 le pays a besoin de main-d’œuvre en raison de la dépopulation, alors que se ferment les uns après les autres les principaux pays d’accueil, des quotas américains (1921-1924) aux « Livres blancs » palestiniens (1930-1939). Aussi plus de 150.000 Juifs se fixent en France, le plus souvent à Paris, venus d’abord et surtout de Pologne (les « Polaks ») mais aussi de Russie, d’Ukraine, de Turquie, de Hongrie, puis de Roumanie et enfin d’Allemagne et d’Autriche (en plus petit nombre). Ces arrivées successives ne constituent cependant qu’une faible partie (moins de 10%) de l’immigration générale, puisque le nombre total d’étrangers résidant en France passe de 1.150.000 en 1911 à près de 3.000.000 en 1931, pour diminuer par la suite jusqu’à l’arrivée des réfugiés espagnols.

En 1939, il y a donc un peu plus de 300.000 Juifs en France, dont près de 200.000 à Paris, ce qui ne représente que 0,75% de la population française (mais près de 4% à Paris). Ces chiffres augmentent encore en 1940 avec l’exode des Juifs belges et hollandais et l’expulsion des Juifs d’Alsace – Lorraine annexée, du Pays de Bade et du Palatinat, ce qui porte le total de la population juive en France à près de 340.000, dont deux tiers d’étrangers. En même temps commence le reflux de la zone occupée vers la zone libre.

Avec cette immigration, le judaïsme français se diversifie et de divise. Au lieu de s’intégrer dans les communautés autochtones, chaque nouvelle vague de réfugiés forme ses propres groupes et garde ses traditions particulières. A travers la multiplicité des structures communautaires religieuses et profanes, deux groupes sociaux, deux cultures, deux types de Juifs s’opposent avec âpreté, surtout à Paris où les étrangers sont beaucoup plus nombreux que partout ailleurs. Ce phénomène se serait probablement atténué avec les années, mais le temps a manqué :

  • Les Français « Israélites » et les immigrés anciens sont parfaitement intégrés et assimilés, mais ils sont souvent déjudaïsés ou en voie de « déjudaisation ». Souvent aisés, très fiers d’être Français, ils sont très attachés à la solution française de l’assimilation. Pour la plupart d’entre eux, le judaïsme n’est pas un phénomène national, ni même une culture, mais une simple confession religieuse parmi d’autres, dont de nombreux se sont d’ailleurs détachés. Ils se retrouvent en principe dans les grandes synagogues consistoriales du XIXè siècle dirigées par des rabbins et des notables respectables et cultivés, presque tous anciens combattants. Mais ces synagogues sont souvent désertées, surtout par les plus jeunes, malgré les efforts des rabbins pour développer une instruction religieuse qui n’est plus guère donnée à la maison. Il y a aussi parmi eux quelques riches et quelques escrocs dont le comportement est monté en épingle par les antisémites.
  • Les immigrés récents sont au contraire presque tous pauvres ou très pauvres et peu intégrés. Cela ne les empêche pas d’être très attachés eux aussi à la « patrie des Droits de l’Homme », ou du moins à l’idée qu’ils persistent à s’en faire malgré bien des déconvenues. Mais leur judaïsme est beaucoup plus vivant. Ils rejettent généralement l’assimilation totale à la française et se défient des israélites français considérés comme des Juifs honteux, qui, de leur côté, ne sont pas très fiers de ces cousins encombrants et peu reluisants… En 1939, ces juifs étrangers d’immigration récente restent donc isolés par la médiocrité de leur condition sociale, leur mauvaise connaissance du français et leur propre fierté. Ils habitent les mêmes quartiers et se retrouvent dans de petites synagogues improvisées, dans de multiples associations d’originaires (Amis de Brest-Litovsk, Union des Bessarabiens, Enfants de Lublin, Société de Galicie, de Lituanie, etc.) dans des commissions syndicales et dans des sociétés de secours mutuels, les unes et les autres très vivaces et très attachées à leurs traditions et à leur indépendance.

Avec la montée du nazisme, un certain rapprochement s’opère : d’abord entre les immigrés, dont les associations se regroupent dès 1928 au sein de la « Fédération des Sociétés Juives de France » ; puis entre les autochtones et les étrangers dont les dirigeants les plus lucides commencent à collaborer dans le cadre d’une œuvre d’assistance et d’un comité de défense, le « Comité d’aide aux réfugiés » (CAR) et la « Ligue Internationale contre l’antisémitisme » (LICA) du journaliste Bernard Lecache. Mais ce rapprochement reste limité et fragile, car la plupart des Juifs sous-estiment encore la gravité du péril.

Il est bien difficile de savoir ce que les Français pensent exactement des Juifs et de l'immigration avant mai 1940. Les vieux préjugés religieux et l’antisémitisme vulgaire à la Drumont persistent sans doute dans le monde catholique et dans la petite bourgeoisie ; ils sont réactivés très tôt par l’antisémitisme doctrinaire de l’Action Française qui influence toute la droite et surtout par le développement de la xénophobie très sensible dans tous les milieux, en particulier dans les milieux populaires depuis que la grande crise mondiale a touché la France vers 1932. L’idée que les étrangers sont responsables du chômage et des difficultés sociales et politiques est très répandue. Un des principaux thèmes de l'extrême droite et de bien des démagogues consiste à dénoncer les Juifs et les judéo - bolcheviks et à les accuser indistinctement de tous les malheurs de la France. Le « rassemblement anti-juif » de Darquier de Pellepoix n’est qu’un des nombreux groupuscules qui répandent ces accusations dont plusieurs sont financés par les nazis. Une de leurs cibles favorites, Léon Blum, est souvent présenté comme un agent de la prétendue Internationale juive.

Ce déferlement de haine suscite de vives protestations dans les milieux de tradition républicaine et au sein des églises, notamment chez les protestants et les artisans du renouveau catholique. Mais cette réaction vient bien tard et semble minoritaire. Le racisme et l’extrême antisémitisme de type nazi sont généralement désapprouvés comme exagérés, mais l’antisémitisme banal et la xénophobie restent très répandus et sont véhiculés par une partie de la grande presse (notamment « Gringoire » et « Je suis partout » mais, aussi « Le Jour » et même « Le Matin ».

Ils s’aggravent encore après le désastre de 1940. L’idée que les Judéo - bolcheviks et autres étrangers auraient joué un rôle maléfique dans la genèse du désastre est un des thèmes les plus populaires de la « Révolution nationale ».

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